En ouverture du sommet Finance en commun (FiCS) 2022, une conférence de recherche s’est tenue sur le rôle des banques publiques de développement dans la finance nationale et internationale, leur contribution à l’atteinte des Objectifs de développement durable (ODD) et leurs actions en cours et potentielles en Afrique. Voici certaines des recommandations politiques qui ont fait l’objet d’une étude approfondie par une équipe internationale de chercheurs ces trois dernières années.
La conférence de recherche du sommet Finance en commun (FiCS) a accueilli des séminaires consacrés aux banques publiques de développement (BPD) et à la finance internationale, et a aussi été l’occasion de lever le voile sur une base de données actualisée, répertoriant les 522 BPD et institutions de financement du développement (IFD) dans le monde. Cette base de données comprend désormais des informations sur leurs priorités et leurs champs d’action : logement, développement agricole, infrastructures, etc.
L’Institut de la nouvelle économie structurelle (INSE) de l’Université de Pékin et l’AFD se sont associés en 2020 pour créer cette toute première base de données complète sur les BPD et les IFD afin de recueillir des données pertinentes sur leur rôle, leur fonctionnement et leur efficacité.
De plus en plus, les BPD soutiennent des projets qui contribuent à atteindre les Objectifs de développement durable (ODD) ; une tendance que le FiCS s’efforce de soutenir depuis sa première édition à Paris en 2020. « Grâce aux deux premiers FiCS, la communauté des banques publiques de développement s’est accordée sur l’importance d’intégrer les ODD à ses activités », indique Jean-Baptiste Jacouton, chercheur à l’AFD, chargé de développer un outil d’intelligence artificielle pour évaluer l’alignement des BPD sur les ODD. « À présent, la question est de savoir comment procéder. Du point de vue de la recherche, l’un des principaux enjeux réside dans l’adoption de méthodes communes permettant aux BPD de rendre compte de leur impact de façon harmonisée ». La publication de rapports plus clairs et harmonisés répondrait au besoin de transparence et de clarté, mettrait en exergue les meilleures pratiques et inciterait d’autres institutions à rejoindre le mouvement et à apporter leur pierre à l’édifice.
Recommandations stratégiques sur les BPD pour les décideurs
Dans le cadre du programme de recherche du FiCS, qui mobilise une vingtaine d’universitaires et de groupes de réflexion, dix recommandations à l’attention des décideurs sont ressorties de trois années de recherche. Soulignons ici six de ces recommandations, qui vont de la garantie d’une bonne gouvernance à la mise en place de « laboratoires de développement » innovants, en passant par la constitution de coalitions financières internationales.
Renforcer les capitaux
De la même manière que les gouvernements et institutions financières ont injecté d’énormes volumes de capitaux dans les économies nationales et mondiales pendant la crise financière de 2007-2008, la reprise économique post-Covid ne sera durable qu’au prix de financements sans précédent. En matière de poids financier, les banques sont extrêmement différentes les unes des autres. Alors que les actifs des banques de développement chinoises représentent au total bien plus de 20 % du PIB national, ceux des institutions financières des pays africains se situent entre 2 et 4 % du PIB.
Mesurer l’impact environnemental et social
Les BPD doivent adopter des outils analytiques afin d’évaluer l’impact de leurs financements, notamment sur les questions environnementales et sociales. Une meilleure coordination entre les grandes banques internationales et leurs homologues locales est également nécessaire. « Le sommet soulignera l’importance des liens unissant les banques multilatérales aux BPD locales. Ces liens sont cruciaux car les premières bénéficient de mandats diversifiés et d’un poids financier important, tandis que les secondes constituent des actrices essentielles des transitions de par leur connaissance et leur maîtrise des contextes locaux », précise Jean-Baptiste Jacouton.
Stimuler l’innovation grâce à des laboratoires de développement
Des laboratoires ou pôles de développement permettraient aux BPD de concevoir et de définir des programmes dont la contribution est multiple, de la protection de la biodiversité aux stratégies d’adaptation au changement climatique, en passant par le soutien aux petites entreprises. Dans des banques comme l’AFD, les chercheurs œuvrent afin de contribuer à l’évolution de leur propre institution et de financer des projets innovants alignés sur les ODD, notamment destinés à lutter contre les inégalités.
Renforcer le soutien des banques à la résilience au changement climatique
Les banques centrales et les autorités de régulation doivent aller plus loin dans l’intégration du développement durable à leurs critères. Les autorités de régulation doivent encourager les investissements qui améliorent la résilience au changement climatique, par exemple, ainsi que d’autres formes de développement durable, dans les activités et mandats des BPD.
Bonne gouvernance et transparence
Des évaluations rigoureuses et indépendantes renforcent la bonne gouvernance des BPD. Leur conseil d’administration doit être ouvert aux membres de la société civile et aux experts indépendants. Des études indiquent qu’avec du soutien et une direction adaptée, même les pays mal gouvernés peuvent avoir des banques nationales de développement (BND) bien gérées. Certaines BND ont évolué et ont entrepris des réformes pour restructurer leur organisation interne, améliorant leur gouvernance malgré des indices de fiabilité institutionnelle relativement faibles au niveau national.
Créer des coalitions engagées dans l’atteinte des ODD
De la même manière que le projet Finance en commun a débuté en 2020 sous la forme d’une coalition pour les BPD dans le but d’aligner plus précisément leurs activités sur les ODD, les banques peuvent unir leurs forces (au cas par cas) afin de poursuivre diverses initiatives de développement. Elles peuvent ainsi partager leurs bonnes pratiques, leur expertise et augmenter leur capital afin de poursuivre des projets et programmes ambitieux, qui contribuent à une transition verte et socialement juste.