La pandémie de Coronavirus fait rage en Occident en Chine, elle a et imposé à tous les pays du monde un nouveau mode de vie. L’observance de mesures dites barrières s’est révélée solution appropriée en attendant l’invention de vaccins efficaces contre cette maladie. Deux ans après, la déclaration de la pandémie, l’Afrique étonne à travers sa résilience face au Covid-19.
Falco VIGNON
35 mille morts sur tout le continent africain depuis le début de la crise du Covid-19, c’est autant de morts en Italie sur la même période. Mais, il faut relativiser en matière de proportions démographiques. Car, l’Afrique compte un milliard deux cents millions (1.200.000.000) de personnes contre 60 millions en Italie. Cela revient à dire que le Coronavirus est environ 20 fois moins mortel en Afrique qu’en Europe. Il n’en faut pas plus pour que l’on parle du miracle africain face au Covid-19. En effet, après deux ans de vie dans un monde de crise sanitaire, le continent africain qui est le plus pauvre s’est révélé le continent le moins touché par la maladie. Il y a moins de cas, moins de malades graves et moins de morts. Avec du recul, l’on peut expliquer cette résilience de l’Afrique face à la maladie. Selon certains experts, la première explication, c’est l’âge. L’âge médian des Africains est de 20 ans, c’est-à-dire que la moitié de la population africaine a moins de 20 ans et l’autre moitié plus de 20 ans. Dans le monde, l’âge médian est de 30 ans et en Europe, c’est 42 ans. Deux exemples peuvent permettre de comprendre comment l’âge influence la résistance au Covid-19. Au Niger, l’âge médian est de 15 ans, donc vous êtes vieux quand vous avez 16 ans. A Monaco, l’âge médian est de 52 ans, c’est-à-dire que vous êtes jeune quand vous avez 51 ans. En Afrique, seulement 3% de la population a plus de 65 ans alors qu’en France, c’est 20%. Or le vieillissement est un facteur aggravant. Logiquement sur le continent africain, 91% des malades du Covid ont moins de 60 ans et 80% sont asymptomatiques.
Un mode de vie bénéfique aux Africains
Les Africains voyagent peu, ce qui fait moins de contamination. Ils vivent beaucoup plus à l’extérieur de leurs agglomérations parce qu’ils sont plus ruraux. Et plus le temps passe, plus on réalise que c’est dans les lieux clos que l’on se contamine le plus. Enfin en Afrique, les vieux restent chez eux. Il n’y a pas d’EHPAD (Etablissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), pas de maisons de retraite. Or ce sont de grands lieux de contamination. Pour résumer, c’est en étant beaucoup moins confinés que les Européens et les Américains, que les Africains s’en sortent beaucoup mieux. Au lendemain du premier cas de Covid-19 déclaré au Bénin, le gouvernement a édicté plusieurs mesures restrictives dont les gestes barrières. On peut citer le port systématique de masque facial, le lavage des mains à l’eau et au savon, l’utilisation de gels hydro-alcooliques, la distanciation sociale, l’interdiction momentanée des transports en commun, l’interdiction des prières en communauté, l’interdiction des manifestations sportives, culturelles, la fermeture des discothèques et structures assimilées et la mise en place d’un cordon sanitaire pour délimiter la zone d’extrême sud potentiellement à risque du reste du pays. Le confinement au sens strict n’a pas été prescrit aux Béninois. Dans les campagnes, les citoyens ont vécu comme si la pandémie ne les concernait pas.
Un patrimoine génétique favorisant
On soupçonne depuis le début de la crise que la propagation a aussi des causes génétiques. Les mesures barrières, notamment le port du masque ne peut, à lui seul, expliquer ce qu’on appelle désormais le miracle africain face au Covid-19. Deux chercheurs, un Allemand et un Suédois viennent d’identifier un gène qui vient de notre ancêtre, l’homme du Néandertal. Il s’agit d’un fragment de chromosome que l’on trouve aujourd’hui sur des malades mais aussi sur des fossiles d’hommes préhistoriques qui vivaient en Croatie il y a 50 mille ans. Ces gènes sont toujours présents mais de façon très inégale dans le monde. Les Européens sont 15% à porter un de ces deux gènes. En Asie du Sud, c’est la moitié de la population et en Afrique, pratiquement personne ne porte l’un de ces gènes. Dès lors, on présume que ces gènes sont à l’origine de nombreux cas de décès liés au Covid-19 en Europe et que cela peut être aussi une des explications du miracle africain.
Rapport entre ces gènes préhistoriques et le Covid ?
Une étude publiée récemment montre que les porteurs de ces deux gènes présentent trois fois plus de risques de développer une forme grave de Covid-19. Par exemple au Bangladesh, (pays du monde qui porte plus ces gènes), ils sont 63% à porter ces gènes, dans les hôpitaux britanniques, les malades originaires du Bangladesh mouraient deux fois plus que les autres. On a donc ce gène très ancien qui explique une partie des inégalités face au Covid. C’est une chance pour les Africains qui ne sont pas porteurs de ce gène. En effet, l’homme moderne qu’on identifie souvent comme Lucie, la femme africaine qui vivait vers le Lac Tchad et qui a été découvert par Yves Coppens, est sorti d’Afrique il y a 60 mille ans. Il a croisé l’homme de Néandertal en Europe, autrement dit Lucie a eu des relations avec des espèces de grands singes quelque part au nord de la Méditerranée vers la Croatie. Ensuite ses descendants qui ont croisé des homos sapiens néandertaliens se sont dispersés dans le monde entier sauf en Afrique. Ils ne sont pas revenus vers le continent de Lucie. Et voilà comment le Coronavirus rappelle à l’humanité une vérité scientifique : tous les humains quelle que soit la couleur de leur peau, sont des descendants d’Afrique.
Interpellation de la conscience béninoise
La riposte contre la pandémie de Covid-19 appelle toutes sortes de solutions. Au-delà des gestes barrières et de la prise en charge, il s’est avéré nécessaire pour le chef de l’Etat Patrice Talon d’engager la responsabilité de ses compatriotes en ces termes : « Notre survie individuelle et collective est entre nos mains, elle est entre les mains de chacun de nous pris individuellement. Chacun de mes compatriotes, vous et moi, pris individuellement, est désormais responsable de notre survie (…). Nous sommes une grande nation, nous allons en donner la preuve une fois encore en éliminant le coronavirus de notre pays sans grand dégât».
Fondement de la vaccination obligatoire au Bénin
Au regard de la persistance de la maladie, le Conseil des ministres du 1er septembre 2021 avait pris de nouvelles mesures notamment la vaccination obligatoire pour certaines couches de la population. En effet, relève le gouvernement, le site d’Allada, dédié à la prise en charge des cas graves, a connu un pic des hospitalisations et des cas graves admis en réanimation et en soins intensifs, avec la particularité que presque tous les malades n’ont pas été vaccinés. Sur 274 cas graves répertoriés dans la période, 264 n’avaient reçu aucune dose de vaccin. Par ailleurs, ce seul site consomme désormais plus de 500 bouteilles d’oxygène par jour, soit l’équivalent d’un an de consommation d’oxygène pour l’ensemble des hôpitaux publics et privés du Bénin, en temps normal. Un tel contexte, aussi alarmant, nécessite que des mesures vigoureuses soient prises. A ce propos, aux termes de l’article 66 de la loi portant protection de la santé des personnes en République du Bénin, l’Etat peut rendre obligatoires certains vaccins pour une frange de la population. C’est pourquoi, en vue d’assurer la sécurité sanitaire des agents de santé et des professionnels impliqués dans l’offre de soins, ainsi que celle des patients qu’ils sont amenés à soigner ; sachant par ailleurs que la COVID-19 les expose particulièrement à des niveaux de risque jamais atteints auparavant, le Conseil a décidé de rendre obligatoire la vaccination contre la COVID-19 pour le personnel médical, paramédical, pharmacien, aide-soignant de même que pour le personnel administratif des formations sanitaires publiques et privées, comme pour le personnel des officines pharmaceutiques. Une telle politique vise à protéger ces acteurs pour assurer le bon fonctionnement du système de santé et, ce faisant, leur éviter d’être des vecteurs de propagation de la pandémie. En outre, le Conseil a instruit les ministres, les responsables de toutes les institutions publiques et de toutes les structures privées à l’effet de recommander fortement la vaccination contre la COVID-19 à tous leurs agents. Dans le même ordre d’idées, plusieurs mesures ont été réactivées et/ou instituées pour renforcer la lutte contre la COVID-19. Le gouvernement a enfin conditionné l’accès à tous les regroupements autorisés à la présentation d’un pass vaccinal valide.
Les limites de la vaccination
Avec les nombreux efforts déployés par le gouvernement béninois, à la date 13 décembre 2021, la couverture vaccinale a atteint 1.144.390 de personnes sur environ 11 millions d’habitants. Ce qui représente plus de 10% de la population. Pour diverses raisons justifiées ou non, les Béninois sont réticents vis-à-vis des vaccins. D’ailleurs les statistiques disponibles sur le site du gouvernement persuadent sur la létalité de Covid 19. En effet, sur 24.907 cas confirmés, 24.705 patients sont guéris. Soit 99,18% de guérison. La maladie est donc guérissable. En outre on note 161 décès sur 24.907 personnes atteintes de Covid 19, soit un taux de létalité de 0,64%. Le taux de mortalité est donc faible. Dès lors, les Béninois observent une certaine résistance face à la vaccination. Des études scientifiques récentes en Europe, montrent que les personnes vaccinées contaminent autant que les personnes non vaccinées. En France, l’étude a montré que le taux de vaccination n’a aucun impact sur le taux d’incidence de Covid 19. Une autre étude faite sur les 68 pays qui se sont faits le plus vaccinés, montre que le taux de vaccination ne joue pas sur la transmission. Et la contamination augmente dans les pays qui se sont faits fortement vaccinés. Au regard de ces constats, Paméla Obertan, docteur en droit et en sciences politiques, chercheuse à l’Université des Antilles soutient que dans « des Etats comme la Texas, c’est fini le Covid. On vit à Miami. Dans les Etats républicains des Etats-Unis on a fini ces restrictions». L’Universitaire guadeloupéenne déclare que « scientifiquement parlant le pass sanitaire s’effondre parce que je peux transmettre, je peux me contaminer». Elle précise qu’en France, 57% des malades sont des gens qui ont été vaccinés. En Ecosse, il y a environ 80% des personnes qui étaient à l’hôpital et même les personnes décédées étaient des personnes vaccinées. « Même les formes graves ou sévères, les personnes vaccinées le font. C’est le cas d’Israël où 90% des personnes hospitalisées étaient des gens vaccinés», regrette Dr. Paméla Obertan.