Le secteur informel est devenu depuis 1980 le principal pourvoyeur d’emploi urbain, même si les entreprises modernes assurent encore 80 % de la valeur ajoutée non-agricole, et il devrait le rester à l’avenir, a déclaré un rapport de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) publié en 2008.
Issa SIKITI DA SILVA
Lydie, une commerçante togolaise, vient d’arriver de Lagos, où elle est partie acheter des médicaments qu’elle compte revendre aux commerçantes en provenance de l’Afrique Centrale. Cela fait cinq ans qu’elle a quitté le Togo pour s’installer à Cotonou, la capitale commerciale du Bénin, pour se lancer dans le commerce informel.
« Je circule entre Cotonou, Lomé, Lagos et parfois je vais au Burkina. J’achète ici pour revendre là-bas et j’achète là-bas pour revendre ici et ainsi de suite », se confie-t-elle au quotidien l’Economiste du Bénin.
« C’est le seul moyen de survivre et de subvenir aux besoins de la famille car mon mari n’a pas un travail stable », ajoute-t-elle.
A moins de 500 mètres de là, vers le marché Saint-Michel, quelques jeunes racolent pour le chargement d’un minibus qui va à Calavi. Malgré un soleil accablant, ils continuent leur besogne paisiblement comme si rien n’était.
« On est là mon frère, du matin au soir, on est habitué à ça. Ainsi va la vie, c’est mieux que rien. C’est l’Afrique, on y peut rien », lance un racoleur qui n’a pas souhaité s’identifier.
Pendant ce temps, de l’autre côté de la route vers le carrefour de Cotonou, les jeunes nigériens, omniprésents dans tout Cotonou, exhibent des pantalons et des chemises à vendre. L’un d’eux, Ibrahim, déclare que bientôt il va rentrer au Niger pour se lancer dans l’élevage.
Heure de pointe
Dès 18 heures, c’est l’heure de pointe à Cotonou. Le marché de Tokpa se ranime et les carrefours sont pleins. Les Zemidjans se déchainent, harcelant les passagers, alors que les commerçants et acheteurs, hommes et femmes de toutes nationalités confondues, se préparent à rentrer chez eux.
C’est la vie à Cotonou. Le secteur informel, fer de lance contre les démons de la pauvreté et du chômage qui terrifient le continent noir, se porte bien au Bénin et en Afrique de l’Ouest. Et il continue de prospérer contre vents et marées, contribuant respectivement près 40% et 50% respectivement au produit intérieur brut (PIB) de l’Afrique et du Bénin.
Face à une Afrique qui continue de patauger dans les conflits armés, la corruption au sommet des états et l’irresponsabilité de ses dirigeants politiques – facteurs qui semblent appauvrir les populations – le secteur informel représente une ressource nationale précieuse de soulagement social. Dans ce sens, ilest un atout pour la création de richesses et d’emplois, bien qu’informels et n’ayant aucune protection sociale.
Emploi informel
Selon un rapport de l’Organisation internationale du travail (OIT) de 2018, en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale, l’emploi informel représente respectivement 92,4 % et 91 % de l’emploi global, tous secteurs confondus.
« Également qualifiée d’économie populaire, l’économie informelle constitue un mode de vie, voire de survie de la population urbaine, pour laquelle elle permet la satisfaction de besoins fondamentaux : se nourrir, se loger, se vêtir, se former, se soigner, se déplacer », note le rapport de l’OCDE sur l’Afrique de l’Ouest.