La dette extérieure de l’Afrique, qui ne cesse de monter à la suite de l’état désastreux des économies du continent durement touchées par le Covid-19, inquiète les experts.
Issa SIKITI DA SILVA
La dette totale des pays à revenu faible et intermédiaire d’Afrique subsaharienne, qui comprend la dette extérieure à long terme (589 milliards de dollars) et la dette extérieure à court terme, a atteint un record de 702 milliards US en 2020 et pourrait atteindre 1000 milliards US en 2022. « La pandémie de COVID-19 a posé des défis sans précédent aux pays à revenu faible et intermédiaire et la crise a fait grimper les besoins de financement et des emprunts, tout en affaiblissant les fondamentaux économiques de chaque pays et sa capacité de service et de remboursement », a fait savoir la Banque mondiale. En Afrique de l’Ouest, six pays figurent sur la liste des États dont la dette extérieure a augmenté de plus de 20% de 2019 à 2020. La Guinée vient en tête avec une augmentation de près de 40%, suivie du Bénin (35%), de la Guinée-Bissau (32%), du Niger (26%), du Togo (30%), de la Côte d’Ivoire (25%) et du Burkina Faso 22%. Le pays le plus endetté en Afrique de l’Ouest est sans doute le Nigeria avec plus de 80 milliards US. Le ratio dette publique/PIB de l’ensemble du continent est au plus haut depuis vingt ans, à plus de 65 %, contre 60 % fin 2020. Il dépasse même 100 % en Angola, au Mozambique, au Soudan et au Zimbabwe. Le FMI estime que 17 pays de l’Afrique subsaharienne sont dans une situation délicate en la matière. Les principaux créanciers des économies africaines en 2015 comprennent, entre autres, l’Association internationale de développement de la Banque mondiale (IDA) et la Chine.
Mauvaise gouvernance
A en croire la Banque africaine de développement (BAD), la mauvaise gouvernance, la faiblesse des capacités institutionnelles, les grands programmes d’investissement public et les dépenses liées à la défense sont d’autres facteurs d’accumulation de la dette. « La découverte dans certains pays des dettes dites cachées, à savoir des obligations absentes des comptes publics, a engendré une augmentation soudaine du fardeau de la dette », a révélé la BAD, qui épingle également les problèmes de gouvernance économique, la corruption et la mauvaise gestion comme étant à l’origine des épisodes de surendettement. Pour le Programme des Nations Unies pour le Développement, (PNUD), l’augmentation de l’endettement est associée à une valeur ajoutée manufacturière plus faible – moins d’emplois lucratifs. L’industrie manufacturière représente moins de 10% du PIB de l’Afrique, contre 16% en moyenne mondiale.
« La hausse des remboursements de la dette réduit également l’espace budgétaire déjà menacé par une faible mobilisation des ressources nationales. Cela limite les dépenses publiques de santé et d’éducation », a souligné le PNUD, ajoutant que les pays fortement endettés présentent des symptômes des opportunités d’investissement manquées, et semblent consacrer moins de ressources publiques aux investissements de transformation à long terme.