(300 projets dont 45 structurants et 19 réformes institutionnelles annoncés)
Conformément aux dispositions de l’article 25 de l’Acte additionnel n°01/2015/CCEG/UEMOA, la commission de l’Uemoa a procédé, au titre de l’année 2019, à l’analyse macroéconomique des Etats membres. Occasion pour l’institution d’analyser les projections faites par chaque pays dans le cadre de leurs Programmes pluriannuels. Que retenir de la politique de croissance du Bénin sur cet intervalle ?
Sylvestre TCHOMAKOU
Avec une croissance de 7.6% en 2019 (contre 6.7% en 2018) imputable à l’ensemble de ses secteurs de production, le Bénin, comme tous les autres Etats, ambitionne un meilleur rendement sur les prochaines années. Dans la dynamique de maintenir un taux de croissance moyen du Produit Intérieur Brut (PIB) réel de 7,6% sur la période2020-2024, le gouvernement du Président Talon, dans son Programme pluriannuel de convergence du pays, au titre de la période 2020-2024, une actualisation du programme 2019-2023 adopté par décision n°05/2018/CM/UEMOA du 21 décembre 2018,a défini de nouveaux projets pour « relancer de façon durable le développement économique et social du Bénin ». Selon le rapport semestriel d’exécution de la Surveillance Multilatérale de l’Uemoa publié en décembre 2019, le Bénin, pour son Programme pluriannuel de convergence sur ladite période, entend promouvoir 300 projets dont 45 projets structurants et 19 réformes institutionnelles. Axé sur les trois piliers du PAG que sont, la consolidation de la démocratie, l’Etat de droit et la bonne gouvernance; la transformation structurelle de l’économie ; et l’amélioration des conditions de vie de la population, ce panel de projets, d’après le rapport, a pour objectifs de réduire progressivement le déficit budgétaire pour atteindre 1,3% en 2024 contre2,2% en 2019 ;améliorer la pression fiscale pour le faire passer de 11,0% en 2019 à 12,3% en 2024 ; et réduire de 9,2 points le ratio de la dette sur PIB pour atteindre 29,5% en 2024.Dans cette perspective, les hypothèses de croissance de l’activité économique varient d’un secteur à un autre.
De la bonne orientation des investissements dans chaque secteur
Pour faire du taux de croissance une réalité, les projections de l’Etat béninois accordent une grande priorité à la bonne orientation de l’ensemble des secteurs d’activités qui profiteraient de la réalisation et des effets attendus des investissements massifs dans le cadre du PAG 2016-2021, ainsi que de l’amélioration anticipée de l’environnement international et régional à moyen terme. En ce qui concerne le secteur primaire, pour sa croissance à 7,8%, pour les quatre (04) prochaines années, l’accent est mis sur l’opérationnalisation des Agences Territoriales de Développement Agricole (ATDA), en vue de favoriser le développement agricole et l’accroissement de la production vivrière et cotonnière. La production du coton, selon les projections, poursuivrait son rythme de croissance pour se hisser à plus de 750 000 tonnes. Pour sa part, le taux de croissance de la valeur ajoutée du secteur secondaire est attendu à 13,5% en 2020 et à 9,7% en moyenne sur la période, sous l’effet des travaux de construction d’infrastructures socio-économiques inscrits au PAG, de la dynamique des industries agroalimentaires et de l’amélioration de l’offre d’énergie électrique. Attendu pour connaître une valeur ajoutée de 6.5% sur l’intervalle, le secteur tertiaire devra miser d’une part, sur le sous-secteur de la télécommunication et, d’autre part, sur une bonne tenue des activités de services tirées par le trafic au Port de Cotonou, suite aux réformes opérées par le gouvernement.
Promouvoir l’emploi, la croissance par l’investissement et l’exportation
Pour lutter contre le chômage, en plus des initiatives déjà engagées, le gouvernement béninois dans ce programme pluriannuel de convergence, compte prioriser la consommation finale, l’investissement et les exportations. Les investissements prioritaires sont prévus dans les domaines tels que : le tourisme et la culture, l’agriculture, le cadre de vie, les infrastructures et transports, le numérique, le capital humain, l’eau et l’énergie. En matière de finances publiques et de la dette, les actions et les mesures sont orientées vers l’accroissement des recettes, la réduction progressive du déficit et une politique prudente de l’endettement. Les recettes budgétaires, quant à elles, devront s’améliorer avec, entre autres, la simplification et l’automatisation des procédures et le renforcement des capacités en ressources humaines ; la poursuite de la migration vers SYDONIA World au niveau de l’Administration Douanière ; la dématérialisation des procédures de dédouanement et l’unification des différents systèmes d’information ; le renforcement des dispositifs d’enregistrement et de suivi des exonérations et dérogations fiscales ; l’application de la Taxe sur les Véhicules à Moteurs (TVM) et le renforcement de la collaboration douane-impôt. La concrétisation de ces objectifs permettra, d’après les estimations faites, de mobiliser des recettes représentant en moyenne13,6% du PIB et des recettes fiscales avoisinant 11,6% du PIB. Par ailleurs, les dépenses totales et prêts nets devront progresser de 8,7% en moyenne pour représenter 15,8% du PIB. Une évolution qui se rendrait possible grâce à la croissance des dépenses d’investissement qui passerait en moyenne à 9,9% et représenteraient 7,5%du PIB, en lien avec la mise en œuvre des investissements prévus dans le PAG.
Des recommandations de l’Uemoa
Après évaluation technique du programme 2020-2024 du Bénin qui, juge-t-elle, « est conforme au canevas type de présentation des Programmes pluriannuels de convergence », et, dans ses orientations, « en cohérence avec le projet de loi de finances, gestion 2020… ainsi que le Programme Economique et Financier appuyé par la Facilité Elargie de Crédit (FEC) du FMI. », l’Uemoa n’est pas restée sans faire des recommandations. Pour aider le Bénin à atteindre ces objectifs, la Commission de l’union recommande au Conseil des Ministres d’inviter les autorités béninoises à prendre les dispositions en vue de poursuivre les efforts de recouvrement des recettes budgétaires à travers l’élargissement de l’assiette fiscale, la rationalisation des exonérations et la lutte contre la fraude en renforçant les contrôles ;la maîtrise des dépenses courantes, notamment, celles relatives à la masse salariale ;les efforts de saine gestion de la dette publique ;l’amélioration de la compétitivité du secteur agricole à travers la mise en œuvre d’une politique axée sur la mécanisation et le renforcement des techniques culturales. Considérant par ailleurs l’impact de la fermeture des frontières du Bénin avec le Nigéria, la commission invite le gouvernement béninois à la poursuite du dialogue avec les autorités nigérianes pour le dégel de la situation. Pour ce qui est des affaires, il est souhaité l’achèvement des actions entreprises, en vue de promouvoir davantage les investissements privés. A l’ensemble de ces recommandations, s’ajoute le processus de réévaluation du PIB à travers un réexamen des données historiques. Ainsi, le Bénin peut rêver bien plus de sa performance actuelle de 7,6% de taux de croissance annuelle.