L’urbanisation monstrueuse (47%) et une croissance démographique folle (2,7%) qui secouent le Bénin ont engendré une crise de logement sévère dans la capitale économique Cotonou, où on observe une augmentation inhabituelle des sans-abris. Les conséquences sont néfastes car la ville suffoque sous le poids d’une pauvreté extrême, d’une dégradation environnementale irréversible et des inégalités sociales indescriptibles.
Issa DA SILVA SIKITI
« On ne sait pas d’où est venu cet homme. On s’est réveillé un bon matin et on l’a vu étendu sur ce pavement, et depuis lors il n’a plus bougé. Il n’est pas d’ici, je crois qu’il est un nordiste. Il pisse par-ci par-là et tousse trop, vomissant des crachats çà et là. On s’inquiète pour notre sécurité car il pourrait être un terroriste qui s’est déguisé en un SDF (sans domicile fixe). Si l’État avait créé des conditions favorables pour développer les milieux ruraux, tous ces gens qui dorment par-ci par-là ne seraient pas venus à Cotonou », se plaint Timothée.
Paul, un zémidjan de Cotonou, déclare que les affaires ne marchent plus à cause des « zems » de l’intérieur qui sont venus nombreux s’installer dans la capitale économique. « Ils transportent les clients à n’importe quel prix, juste pour se faire du pognon. C’est déplorable. La majorité dort dehors car ils n’ont pas de maison ici ».
Dans une autre partie de la ville, Abou pointe un site où une femme et ses enfants avaient érigé une sorte de « tente » le long d’une artère principale. « Tous les quatre dormaient ici mais je ne les vois plus ces derniers temps. Peut-être, ils ont dû changer de place à cause des pluies diluviennes qui s’abattent dernièrement sur la ville. Cotonou est inondée par des SDF, ils sont devenus nombreux ces derniers temps. Les gens dorment et mendient partout. C’est le chaos total. L’environnement se dégrade à grande vitesse et la ville se meurt à petit feu, il faut que l’État prenne ses responsabilités ».
Défis liés à l’urbanisation
A en croire un expert en urbanisation et démographie, Eduardo Lopez Moreno, la difficulté est que la plupart des grandes villes des pays en développement ne sont pas prêtes à relever les défis liés à l’urbanisation. « Elles ne génèrent pas de structures urbaines fonctionnelles pour répondre aux problèmes de gestion et de planification de cet environnement. Leurs actions sont rarement pensées dans le cadre d’un système unifié », souligne-t-il dans une analyse publiée sur Constructif.fr.
Selon le site ZenApi, l’urbanisation non contrôlée entraîne, entre autres, la prolifération des bidonvilles. « L’insuffisance de logements abordables et adaptés entraîne une augmentation du nombre de bidonvilles, où les conditions de vie sont souvent précaires et insalubres. Ces zones présentent des risques pour la santé et la sécurité des habitants, ainsi que pour l’environnement en raison du manque d’infrastructures adéquates telles que l’assainissement ou la gestion des déchets ». Et d’ajouter : « Elle exerce une pression considérable sur les infrastructures existantes comme les réseaux routiers (embouteillages monstres), l’eau potable, l’assainissement et les équipements publics. Elle provoque aussi la pollution de l’air, de l’eau et des sols, et génère les inégalités sociales et économiques ».