La dette cachée, cet emprunt pour lequel un gouvernement est responsable mais qui n’est pas divulgué à ses citoyens ni aux autres créanciers, nuit aux économies et constitue une menace croissante pour les pays à faible revenu, lesquels sont déjà lourdement endettés et dont les besoins annuels de refinancement ont triplé ces dernières années, martèle le Fonds monétaire international (FMI) dans une tribune publiée récemment sur son site.
Issa DA SILVA SIKITI
Même si le montant global de cette dette est largement inférieur (1 000 milliards de dollars) par rapport à celui de la dette publique mondiale qui dépasse les 91 000 milliards de dollars, ces prêts secrets sont bien réels et peuvent avoir des conséquences potentiellement désastreuses, avertissent Alissa Ashcroft, Karla Vasquez et Rhoda Weeks-Brown, les trois expertes du FMI, qui ont rédigé la tribune.
Des lois nationales, qui doivent être mises à jour pour garantir la transparence des obligations publiques sur la divulgation, peuvent aider à soulager la douleur, soulignent-elles, déplorant le manque d’exigences légales adéquates en matière de divulgation de ces dettes à travers le monde.
« Une base juridique solide est essentielle pour signaler qu’il existe une obligation claire de communiquer les données sur la dette d’une manière à la fois opportune et pertinente pour l’analyse politique, la transparence et la responsabilité. Il existe au Bénin, au Kenya et au Rwanda des lois strictes en cette matière, qui définissent à la fois les exigences en matière de rapport sur la dette publique et leurs délais ».
Prêts chinois cachés en Afrique
Selon un récent rapport du « National Bureau of Economic Research », cité par le site de la Brookings Institution, qui met en évidence l’ampleur des prêts chinois cachés en Afrique, ces dettes se situent principalement dans les pays riches en ressources naturelles. « À l’échelle mondiale, 50% des prêts chinois à l’étranger ne sont pas officiellement enregistrés dans la base de données des statistiques de la dette internationale de la Banque mondiale ».
A en croire ce rapport, les pays africains représentent la moitié des 50 pays les plus endettés envers la Chine en pourcentage du produit intérieur brut (PIB). « Le Djibouti, le Congo-Brazzaville, le Niger et la Zambie figurent dans le top 10 de ces pays ».
La transparence de la dette profite non seulement directement aux pays, mais elle est également essentielle au travail du FMI, rappellent Alissa Ashcroft, Karla Vasquez et Rhoda Weeks-Brown. « Des formes de dette cachées et autrement opaques rendent la tâche du FMI plus difficile de remplir son mandat principal à plusieurs égards. Par exemple, les prêts garantis, les formes de financement nouvelles et complexes et les accords de confidentialité font qu’il est difficile pour le FMI d’évaluer avec précision la dette d’un pays et de contribuer à remettre son économie sur les rails ».
« Nous recommandons que la définition de la dette publique soit large et complète, ce qui signifie qu’elle devrait englober les arriérés, les produits dérivés et les swaps, les crédits fournisseurs et les hypothèses de garanties ainsi que les prêts et titres. La définition devrait également couvrir les fonds extrabudgétaires, les fonds fiduciaires publics (fonds de pension, par exemple) et les véhicules à vocation spéciale ».