L’impact du paludisme sur l’économie africaine est estimé à 12 milliards de dollars de pertes par an, selon le ‘’Voices for a Malaria-Free Future’’, un projet de l’Ecole de santé publique Johns Hopkins Bloomberg. Des économistes réputés estiment que le paludisme entraîne une ‘’pénalité de croissance économique’’ pouvant atteindre 1,3% par an dans les pays africains où le paludisme est endémique.
Issa SIKITI DA SILVA
Au Bénin, pays à vocation agricole qui tire à peu près 34% de ses richesses de l’agriculture, les absences des travailleurs dans les champs sont monnaie courante à cause de la présence remarquée des moustiques dans les milieux ruraux et les domaines forestiers.Les enfants et les femmes pauvres vivant dans les zones rurales sont les plus exposés au paludisme, qui tue les ressources des familles.
« Le paludisme décourage les investissements et le tourisme, affecte les modes d’utilisation des terres et la sélection des cultures, entraînant une production agricole sous-optimale, réduit la productivité du travail et entrave l’apprentissage »,souligne le ‘’Voices for a Malaria-Free Future’’ sur son site.
En avril de cette année, Immaculé Apovo, une travailleuse agricole qui était revenue se soigner à Cotonou, raconte sa désolation. « Ma patronne m’avait accordé trois jours de repos mais j’en avais fait cinq. Elle était dans tous ses états mais je n’avais pas le choix, il y a trop de moustiques là-bas mais les soins de santé ne sont pas adéquats », a-t-elle déclaré.
Dans la plupart de pays durement touchés par la malaria, la faiblesse des systèmes de santé continue de freiner les progrès, a déclaré l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans son ‘’World Malaria Report’ de 2015.
L’Afrique, continent à haut risque
« Environ 3,2 milliards de personnes restent exposées au paludisme dans le monde. En 2015 seulement, on estimait à 214 millions le nombre de nouveaux cas de paludisme et à 438 000 décès. Environ 80% des décès dus au paludisme sont concentrés dans seulement 15 pays, principalement en Afrique », a affirmé le World Malaria Report de 2015.
Le chiffre de 12 milliards de dollars de pertes causé par le paludisme tient compte, entre autres, des coûts des soins de santé, de l’absentéisme, des journées d’éducation perdues, de la baisse de productivité due aux lésions cérébrales dues au paludisme cérébral, a poursuivi‘’Voices for a Malaria-Free Future’’.
Fardeau économique sur les ménages
Le paludisme a non seulement un impact négatif sur les entreprises mais il affecte aussi directement et indirectementles ménages. Selon une étudemenée en 2006dans six quartiers précaires et trois villages lagunaires d’Abidjan (Côte d’Ivoire) où les familles vivent sous la menace constante des moustiques, les coûts directs associés au paludisme représentent en moyenne 12 à 14% du revenu des ménages dont les membres actifs perdent en outre quatre à sept jours de travail.
« Le stress économique lié à cette maladie est d’autant plus important que les populations vivent avec moins d’un dollar US par habitant par jour couplé à une faible assistance de la part de la communauté. Les ménages adoptent des itinéraires thérapeutiques supposés à moindre coût mais ils ne tiennent pas compte du rapport coût efficacité de ces recours », A.S. Kouadio, G. Cissé, BrigitObrist, Kaspar Wyss et J. Zingsstag, les auteurs de cette étude ont affirmé.
Globalement, les ménages africains perdent jusqu’à 25% de leurs revenus en raison de cette maladie.