La conférence des chefs d’Etats et de gouvernement des pays de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa) s’est tenue à Abidjan le vendredi 12 juillet 2019. Cette importante assise a adopté des décisions importantes concernant le fonctionnement de plusieurs institutions de la région dont l’Autorité des marchés financiers de l’Umoa (AMF-Umoa). A la sortie de cette rencontre, le président de l’AMF-Umoa a livré ses impressions aux médias.
L’économiste du Bénin : Le capital social minimum requis aux entreprises souhaitant faire appel à l’épargne publique sur le marché régional passe de 100 à 10 millions FCFA. Qu’est-ce qui fonde cette décision en faveur des PME ?
Mamadou Ndiaye : L’année dernière, le conseil des ministres de l’Union monétaire ouest-africaine (Umoa) avait accepté de valider cette proposition du Conseil régional de l’épargne publique et des marchés financiers (Crepmf), qui permet désormais aux petites et moyennes entreprises de pouvoir accéder au marché et de faire appel à l’épargne publique. Comme les Etats émettent des obligations par appel public à l’épargne, l’Ohada qui est le droit commun qui régit l’espace économique, avait fixé le montant à 100 millions FCFA comme capital pour qu’une entité puisse faire appel public à l’épargne. Ce qu’on a proposé c’est qu’on puisse avoir une dérogation pour que les petites et moyennes entreprises (PME) qui ont au moins 10 millions FCFAcomme capital puissent faire la même chose. Un compartiment est dédié à celles-ci pour qu’elles puissent proposer des titres que le public peut souscrire afin de financer leurs activités. C’est donc une innovation majeure qui permettra désormais à cette catégorie d’entreprises d’accéder au financement. Elles peuvent mobiliser des ressources financières au niveau des banques, mais généralement ce sont des ressources à court terme. Or le marché financier permet d’avoir des ressources à moyen et long termes, donc sur plusieurs années et à moindre coût.
Le Crepmf change de dénomination et deviendra ‘’Autorité des marchés financiers’’, après que les Parlements nationaux auraient ratifié le traité signé par les chefs d’Etat de l’Uemoa, le 12 juillet dernier à Abidjan. Quelles sont les raisons de cette mutation ?
En réalité, il faut rappeler que ce changement a été décidé par la conférence des chefs d’Etats depuis l’année dernière. Les chefs d’Etats avaient accepté la proposition qui avait été faite au conseil des ministres par le Conseil régional des marchés financiers pour changer la dénomination de cet organe de l’Uemoa qui s’appelle en principe depuis cette date. Très simplement parce qu’il y a une confusion qui se fait très souvent entre cette dénomination et celle de certaines structures au plan national dans différents pays. Vous entendez parler de collectivités locales régionales, conseil régional, cela crée une confusion. C’est le premier élément.
Le deuxième élément, c’est pour répondre à une dynamique au plan international qui s’est dessinée ces dernières années. La plupart des régulateurs de marchés financiers ont adopté justement cette démarche qui semble être mieux conforme aux missions et aux statuts de ces organes. Au Canada, en France et au Maroc, vous avez ces mêmes dénominations. Dans les pays francophones en général, les régulateurs ont de plus en plus ces dénominations.
Vous espérez cette ratification pour quand ?
Le traité a été signé par les huit chefs d’Etats. Il faudra que les Parlements nationaux puissent le ratifier. Comme prévu par l’article 37 du traité qui prévoit que les procédures de modification passent forcement par la ratification des Parlements nationaux. Nous avons eu l’assurance des chefs d’Etas qui vont appuyer le processus pour que ces ratifications puissent avoir lieu le plus rapidement possible.
En quoi consiste le rôle de régulateur de l’AMF ?
Pour schématiser, il y a les marchés primaires où on émet des titres et les marchés secondaires, principalement la Bourse des valeurs mobilières, qui est mieux connue. L’Autorité des marchés financiers est le régulateur des marchés financiers. C’est l’Autorité qui a pour charge la supervision du marché financier régional. Tout comme vous avez la BCEAO qui supervise les banques, la Cima qui supervise les assurances. Nous avons une double mission : permettre de mobiliser les ressources à moyen et long terme sur le marché financier et de faire en sorte que cette épargne soit protégée. Un marché c’est la confiance. Plus vous avez confiance au marché, vous pouvez avoir votre épargne et la déplacer en obligation : vous pouvez acheter et vous pouvez vendre à tout moment. Le marché doit susciter la confiance, la sécurité, et il y a quelqu’un derrière qui regarde qui emprunte et qui est sûr de pouvoir rassurer qu’au moment où vous êtes prêts pour récupérer vos mises, vous serez remboursés à bonne date avec l’intérêt. Nous sommes l’Autorité qui supervise justement le respect, dans l’espace Umoa, des dispositions réglementaires qui régissent le marché financier.