Le Directeur général de la Bourse régionale des valeurs mobilières (Brvm), Edoh Kossi Amenounve, était l’invité de l’économie de la chaine de télévision France 24, le jeudi 11 octobre dernier. Le Dg/Brvm a passé au scanner le bilan du marché boursier de l’Uemoa et les perspectives économiques. « La diaspora de l’Afrique subsaharienne est évaluée aujourd’hui à presque 24 millions de personnes mobilisant quasiment 40 milliards de dollars chaque année et je crois que c’est une manne qu’on ne peut pas négliger, qu’on doit intégrer dans nos sources de financement » a fait savoir le patron de la bourse régionale de l’Uemoa.
France 24 : En quoi consiste la cotation en bouse, comment s’y prend la Bourse régionale des valeurs mobilières (Brvm) et quel pouvait être l’apport de la diaspora africaine dans l’appui au développement du continent ? C’est quoi la BRVM ?
Le Dg Edoh Kossi Amenounve : La BRVM, c’est la bourse qui est commune aux huit pays de l’UEMOA. Aujourd’hui nous sommes la 6ème bourse en Afrique, derrière donc Johannesburg, Casablanca, Lagos, le Caire et Nairobi. Actuellement la capitalisation totale de notre marché, quand je prends les actions, les obligations tournent autour de 13 milliards d’euros valables au 30 septembre. Nous avons lancé nos activités en 1998 après une création en 1996. Notre ambition est d’avoir une bourse qui soit au service du financement à long terme de nos économies.
Quelle est l’actualité de la Brvm ?
C’est vrai qu’on avait commencé beaucoup plus bas et on n’a surtout connu une progression très forte au cours des cinq dernières années où notre capitalisation a quasiment triplé et où nous avons accueilli plus de huit sociétés à la cote de la Brvm. En 2016 et 2017, la BRVM a enregistrée une tendance baissière, une tendance qui s’est poursuivie cette année d’ailleurs et qui s’est renforcée, c’est un peu le climat général sur toutes les bourses africaines et les bourses des pays émergeants puisque ces pays sont exposés à un certain maintien de l’évolution de la conjoncture internationale et aussi des problèmes internes à ces pays notamment en Afrique le ralentissement de la croissance économique en Afrique subsaharienne.
Un bref bilan des cotations à la BRVM,
45 sociétés cotées. Nous avons beaucoup d’entreprises qui sont de filiales de groupes européens (groupes étrangers), nous avons les entreprises africaines aussi. Notamment notre première capitalisation c’est la SONATEL, la Société Nationale de Télécommunication du Sénégal. Nous avons des banques (ECOBANK COTE-D’IVOIRE, la SGBC, la CORIS BANK INTERNATIONALE DU BURKINA), nous avons l’Onatel, nous avons des entreprises africaines qui sont des grosses capitalisations sur notre marché.
On comprend que vous êtes assez sollicité mais jusque là, vous avez une couverture limitée en Afrique?
Effectivement nous avons, je dirai trop de bourses et notre espace de marché est trop fragmenté. Je pense qu’une consolidation est indispensable et plusieurs initiatives ont été déjà prises sur le continent pour le regroupement des bourses. Nous avons une initiative en Afrique de l’Ouest que nous appelons le « Wabeak » (intégration des bourses de la BRVM du Ghana, du Nigéria et du Cap-Vert. Nous avons des initiatives en Afrique de l’Est pour regrouper autour du Kenya, l’Ouganda, le Rwanda etc…Nous avons une initiative dans la Sadec en Afrique du Sud. Je pense que, c’est la voie que nous devons privilégier pour avoir des plateformes boursières beaucoup plus solides, beaucoup plus liquides et qui soient attractives pour les investisseurs et aussi pour les entreprises.
Et donc le processus d’intégration atteindra les autres pays africains
Si, puisque nous on a déjà un projet en Afrique de l’Ouest. La BRVM est un exemple d’intégration de bourse sur huit (08) pays. Nous voulons l’élargir au quinze (15) pays de la CEDEAO. Avec les anglophones, le Nigéria, le Ghana et les autres pays de la CEDEAO. Vous savez, la CEDEAO est un espace économique beaucoup plus large que l’UEMOA. Donc un espace économique aussi où on retrouve de grands pays économiquement puissants comme le Nigéria, donc pour nous, il est important que l’intégration économique de notre espace ouest africain soit accompagnée justement de l’intégration financière. Et là, les marchés capitaux peuvent joués un rôle extrêmement important. C’est pour cela que nous tentons ce rapprochement aujourd’hui entre la bourse de Ghana, de la BRVM et puis la bourse du Nigéria.
L’environnement réglementaire est suffisant ?
Il est assez conforme aux standards internationaux. Il y a des divergences liées aux droits communs. Vous savez que le droit anglo-saxon n’est pas le même droit que français ou latin. Nous essayons de nous rapprocher par les meilleurs standards internationaux, de façon très pragmatique, c’est adopté les règles de marché afin qu’elles soient plus proches des meilleurs standards, donc le pays qui a les meilleurs standards, c’est des règles que nous allons appliquées. Je pense que les marchés sont essentiellement éligibles par des règles, je dirai anglo-saxon mais il est clair qu’il a des actions de droit latin qui sont extrêmement importantes aussi et qui favorisent la protection des épargnants et nous faisons une combinaison assez réussi entre les deux. La BRVM est déjà une combinaison assez réussie entre les deux.
Entre le droit anglo-saxon et Latin, il y-a-il une spécificité dans la finance ou pas ?
Non, il n’y a pas de spécificité, mais il y a des exigences par exemple de diffusion d’information par les sociétés cotées, la fréquence de diffusion de ses informations, il y a des spécificités sur tout ce qui est déclaration de franchissement de seuils, de prise de position dans les sociétés cotées qui doivent être en tout cas harmonisées pour permettre le fonctionnement d’une bourse régionale.
Et les financements ?
Vous savez les besoins de financement en Afrique sont extrêmement importants, on parle de 1200 milliards de dollars de besoin de financement. Aujourd’hui, ces besoins ne sont pas satisfaisants, je dirai très peu satisfaisants, les ressources locales ne sont pas satisfaisantes même s’il y a des efforts à faire pour mobiliser davantage l’épargne locale.
Doit-on comprendre que l’étranger aura nécessairement son mot à dire ?
Les investissements venant de l’étranger, il s’agit des investissements directs étrangers ou bien des investissements portefeuille sont aussi insuffisants donc, il est tout à fait normal que nous normal que nous explorons d’autres sources de mobilisation de fait pour le financement de nos économies et là, la diaspora peut jouer un rôle extrêmement important. La diaspora de l’Afrique subsaharienne est évaluée aujourd’hui à presque 24 millions de personnes mobilisant quasiment 40 milliards de dollars chaque année et je crois que c’est une manne qu’on ne peut pas négliger, qu’on doit intégrer dans nos sources de financement. La bonne nouvelle est que la diaspora est très favorable à cela. La diaspora africaine à envie de participer à la construction de l’Afrique en vue de participer au développement de notre continent et je suis allé rencontrer aux Etats-Unis particulièrement la diaspora sénégalaise et j’ai vu une diaspora très bien organisée dans des associations qui regroupent plus de 7 mille membres, une association particulièrement celle des Sénégalais d’Amérique qui est très active et j’ai senti vraiment auprès de la diaspora cette envie là de communiquer dans le financement de nos économie.
L’argent de la Diaspora va plus aux pays anglophones. Vous parlez de la diaspora et insistez sur celle sénégalaise aux USA mais elle ne peut pas à elle seule faire décoller le continent
Oui, il y a des pays, j’ai parlé du Sénégal, le Mali, le Burkina, la Côte-d’Ivoire, il y a plusieurs pays en tout cas de notre sous région qui ont une diaspora qui transfert beaucoup d’argent. Le problème n’est pas tant la destination mais c’est l’utilisation des fonds de la diaspora. Aujourd’hui ses fonds sont essentiellement orientés vers de la petite consommation, régler des problèmes de famille etc. Ce que nous souhaitons, c’est que ses fonds là s’orientent de plus en plus vers l’investissement dans l’agriculture, l’industrie, l’immobilier pour pouvoir créer de la richesse, de l’emploi et c’est çà le vrai défi. Pour cela, il faut des supports suffisamment institutionnels pour pouvoir canaliser les épargnes. C’est pour cela que nous parlons d’obligation de la diaspora. Nous pensons que la (Fintech) va aider l’Afrique aider particulièrement notre union, l’UEMOA, je dirai, dans la recherche de solution à certains problèmes que nous vivons depuis quelques années notamment la banalisation.
On parle de bourse, ce qui suppose, l’épargne et la mobilisation de ressources, que faites-vous déjà dans ce sens ?
Aujourd’hui la (Fintech) va permettre une meilleure inclusion financière et aussi va donner un accès plus aisé aux populations, tout ce qui est au service financier. C’est fondamental parce que c’est pour nous la voie privilégiée pour mieux canaliser l’épargne de nos populations et surtout leur offrir un service de qualité pour tout ce qui touche la finance. C’est très symbolique, nous voulons encourager les talents, nous voulons encourager les jeunes africains, les jeunes ressortissants de notre union à s’exprimer et a vraiment nous proposer des projets intéressants et nous allons analyser à ces projets là à titre symbolique, peut-être, leur donner quelques prix. Mais ce qui est important pour nous, c’est après le concours, il faut que nous, on les accompagne surtout sur les projets qui vont toucher les marchés capitaux mais nous allons demander à nos partenaires aussi, banques, assurances et autres d’accompagner les projets qui peuvent révolutionner la banque ou les assurances et je crois que aujourd’hui l’accompagnement, en tout cas nos institutions peuvent apporter à ces jeunes qui ont du talent et qui sont ingénieurs et qui veulent aussi s’exprimer dans cette Afrique qui est en pleine évolution.
Source : France 24