L’Agence Française de développement (AFD) et le Bénin ont signé en 2017 un accord de financement de six millions de FCFA dans le cadre de la mise en œuvre du Projet d’appui au développement des filières protéiniques (PADEFIP). D’importants investissements ont été consentis depuis lors avec de réels impacts sur la productivité. Séraphin Bokossa, « pisciculteur clé » et président de l’association des pisciculteurs de la commune de Covè, bénéficie depuis 2021 de l’accompagnement du PADEFIP. Cela lui a permis en si peu de temps de décupler sa production. En deux ans d’appui, il a réalisé de nombreuses prouesses et nous en parle dans cette interview.
Qu’avez-vous réellement gagné grâce à l’intervention du projet PADEFIP de l’AFD dans votre activité?
Le projet PADEFIP et AFD sont venus collaborer avec nous puisqu’on était là avant eux. Ils ont voulu savoir comment nous travaillons et je leur ai expliqué. Ils ont quelques connaissances à qui ils ont promis faire appel pour nous aider à travailler et à améliorer nos pratiques de production. C’était une promesse mais ils l’ont tenue à notre grande satisfaction. Ils nous ont fait tellement de biens et je ne peux tout citer ici. Nous avons connu, découvert, appris et bénéficié de plein de choses avec eux. Ils nous ont formés, coachés et conseillés sur les méthodes à utiliser pour toujours garder nos poissons en bonne santé, sur comment nourrir nos poissons en cas d’une situation comme la crise de la Covid-19 qu’il y a eu lieu entre temps par exemple sans craindre la rupture, la pénurie de provende. Ils nous ont montré les plantes et autres choses importantes qui pourraient nous aider localement à bien nourrir et prendre soin des poissons, ils nous ont appris aussi à réaliser les bassins confortables et durables, à prendre soins des bassins et étangs aux poissons etc. Et pour tout cela, nous leurs disons un grand merci, merci à l’AFD et au projet continental PADEFIP 2.
Moi-même, Bokossa Séraphin, sur ma ferme ils ont mené des actions que je ne peux jamais oublier et dont mes petits-fils pourront même profiter dans l’avenir. Non seulement, ils m’ont aidé à construire des bassins consistants et durables dans le temps, mais ils m’aident et m’encouragent à travailler en ce moment.
De combien d’étangs disposez-vous actuellement?
J’utilise présentement 8 grands étangs de différentes dimensions ou volumes. Tous ces étangs réunis feront 5340 m² d’étang. Quant aux bassins, ce que j’avais en plus de ceux issus de l’appui du projet PADEFIP de l’ADF dans ma ferme, j’en suis à 450 m³. Voilà l’aide qu’ils m’ont apportée personnellement et ils ne cessent de nous encourager à aller loin dans la production et c’est pour cela que je tiens à leur dire toutes nos gratitudes et mon admiration.
Avant l’avènement du PADEFIP, quelles étaient vos capacités de production et de distribution et depuis PADEFIP, qu’est-ce qui a changé ?
Lorsqu’il n’y avait pas ce genre de projet, moi, dans mon élevage de poisson, il y a des choses qui me manquaient, des choses que je n’arrivais pas à limiter. J’avais beaucoup de perte de poissons car, dans le but de multiplier ma production, j’en mettais suffisamment dans les bassins de sorte à amasser beaucoup d’argent mais beaucoup meurent malheureusement par la suite. C’est donc l’apport du PADEFIP qui m’a permis de savoir le nombre limite de poissons à mettre par m². Avant le PADEFIP, je ne vendais pas trop de poissons, si c’est trop en 1an, c’est 1 tonne ou 1 tonne 200 kilos. Mais, depuis 2021 qu’ils sont venus pour travailler avec nous, ma production est passée d’une tonne à 10 tonnes aujourd’hui.
En termes de revenu, ça avoisine combien déjà ?
Avant le PADEFIP, on était dans le noir, on n’avait pas de clientèle et c’est seulement nos parents qui abusent de nous ici et prennent le kilo à 1500Fcfa. Aujourd’hui, nous cédons le kilo à 2200 et la tonne, je la cède à 2 million 200 mille de nos jours.
On peut se convaincre de ce que vous faites des profits et que vous êtes à l’aise dans la pisciculture. Mais beaucoup de personnes, des jeunes et autres sont toujours au chômage et ont honte de s’engager ou n’ont d’yeux que pour les occupations bureaucrates…avez-vous un appel à leur lancer, un conseil?
Sur cette question, je vous parlerai de ma propre expérience. Moi-même j’étais menuisier et pas un petit, j’ai ma scierie, je fais la charpente et un peu de coffrage aussi. Mais vu le profit et le bénéfice que je trouve dans la pisciculture aujourd’hui, j’ai commencé par négliger la menuiserie pour m’accrocher plus à ce domaine. Mais personnellement, je ne sais pas vivre en vase clos ou en autarcie. Ainsi, il n’y a pas celui-là aujourd’hui dans notre association ici à Covè à qui je n’ai pas avoué que la pisciculture est très profitable. Je leur montre même mon cahier de compte. Mes jeunes frères qui se baladent un peu partout maintenant, toute proportion gardée, je les qualifie de fainéants. Car, quand on s’accroche à un truc et on se donne à fonds, on a toujours le peu. Il y a bel et bien à faire et pourtant, on crie au chômage. Moi, je gagne bien ma vie dans la pisciculture et ceux qui font le même travail savent de quoi je parle. Et si nos jeunes qui ne savent pas peuvent m’entendre, ils m’en diront des nouvelles. La pisciculture est rentable.
Réalisation: Bidossessi WANOU