Le taux de croissance moyen en Afrique subsaharienne devrait passer de 2,8 % en 2017 à 3,4 % en 2018, en hausse dans environ deux tiers des pays. Mais la région fait face à la hausse des vulnérabilités liées à la dette. Pour renverser la tendance, il y a des défis à relever selon les perspectives économiques régionales éditions d’avril 2018 du Fonds monétaire international (FMI). Les données du rapport ont été présentées le jeudi 24 mai 2018 à Cotonou par Karim Barhoumi, représentant résident du FMI au Bénin.
Abdul Wahab ADO
L’Afrique subsaharienne devrait voir sa croissance accélérer légèrement, mais les facteurs de vulnérabilité s’accumulent et des mesures s’imposent pour relever le potentiel de croissance à moyen terme. Le taux de croissance moyen de la région devrait passer de 2,8 % en 2017 à 3,4 % en 2018, en hausse dans environ deux tiers des pays de la région, grâce notamment à une croissance mondiale plus forte, à la progression des prix des produits de base et à l’amélioration de l’accès aux marchés. Selon les perspectives économiques, la relance du secteur privé est une priorité au Sud du Sahara. L’Afrique subsaharienne a des besoins gigantesques en matière d’infrastructures et de développement social. Face à la hausse des vulnérabilités liées à la dette dans la région, les pays devront recourir davantage à des sources de financement durables ce qui fera de la mobilisation des recettes fiscales un des enjeux publics les plus pressants dans la région. Les pays de la région pourraient mobiliser des recettes fiscales supplémentaires de l’ordre de 3 à 5 % du PIB dans les années à venir, ce qui dégagerait des moyens pour investir dans les infrastructures et le capital humain. Pour être efficaces, les mesures de mobilisation des recettes doivent s’appuyer sur une politique fiscale bien conçue, prévoyant notamment l’élargissement de l’assiette de la TVA et de la fiscalité directe, et appliquée par une administration fiscale compétente. En outre, la mise en œuvre de réformes de l’administration fiscale dans le contexte d’un plan à moyen terme est une stratégie qui a fait ses preuves, même dans des pays où les capacités initiales étaient peu développées. Enfin, des politiques visant à améliorer la gouvernance, à lutter contre la corruption et à assurer l’efficience et la transparence des dépenses publiques peuvent inciter dans une grande mesure les contribuables à s’acquitter de leurs impôts ce qui contribue en définitive à la mobilisation des recettes.
La croissance durable passe par une relance des investissements privés
Pour les pays qui cherchent à adopter une trajectoire de croissance durable, il est prioritaire d’insuffler plus de dynamisme au secteur privé. La part de l’investissement privé dans le PIB est bien plus faible en Afrique subsaharienne que dans les régions présentant un niveau de développement comparable, et ce depuis très longtemps. Les politiques mises en place doivent veiller à constituer un environnement économique et institutionnel porteur, appuyé par des infrastructures de qualité et une main-d’œuvre qualifiée. Les États doivent veiller avant tout à assurer la stabilité macroéconomique, à renforcer la législation en matière d’insolvabilité, à libéraliser le commerce extérieur et à élargir l’accès au crédit. Ils peuvent également envisager de recourir à des structures de financement innovantes, telles que des partenariats public privé, à condition d’évaluer attentivement les engagements conditionnels qu’elles impliquent pour le secteur public. Les déséquilibres extérieurs se sont réduits, mais les résultats sont mitigés en matière d’assainissement des finances publiques et les vulnérabilités s’aggravent : environ 40 % des pays à faible revenu de la région sont surendettés ou présentent un risque élevé de le devenir. Ainsi, se pressentent les perspectives économiques régionales éditions d’avril 2018 intitulée « Mobilisation des recettes fiscales et investissements privés ». Le statistiques ont été présentées aux professionnels des médias à Cotonou par Karim Barhoumi, représentant résident du FMI au Bénin. Selon lui, les perspectives économiques régionales d’avril 2018 ont montré que la croissance des pays exportateurs de l’Afrique subsaharienne est inférieure à celle des pays pauvres à ressources naturelles. Et cette reprise de la croissance de la zone est due à un certain nombre de facteurs internes notamment à la progression des prix des produits de base et à l’amélioration de l’accès aux marchés. A cette occasion, le représentant résident au Bénin du FMI a rappelé les défis prioritaires dont la réduction des vulnérabilités macroéconomiques, hausse de la croissance à moyen terme et la transformation structurelle. Au plan interne, Karim Barhoumi a expliqué que la reprise de la croissance est due à la hausse attendue des prix des matières premières, à l’amélioration de l’accès aux marchés des capitaux dont bénéficient certains pays qui continuent d’attirer des capitaux étrangers. La région subsaharienne se trouve aussi, ajoute-t-il, dans un contexte financier favorable à l’échelle mondiale. En effet, le secteur privé contribue peu à l’investissement dans les pays selon les données.
Les réformes à mettre en place
Dans plusieurs autres pays, riches ou pauvres en ressources naturelles, ainsi que dans certains États fragiles, la croissance se maintient à 6 % ou au-delà, tandis qu’un certain nombre de pays connaissent des conflits internes qui se traduisent par un nombre record de réfugiés et de personnes déplacées. L’économie de l’Afrique du Sud et du Nigéria, les deux poids lourds de la région, tourne en dessous de la normale, ce qui pèse fortement sur la croissance globale de la région. L’élan amené par la conjoncture extérieure favorable devrait s’amenuiser à terme. Le regain de croissance que connaissent les pays avancés devrait s’essouffler et les conditions d’emprunt dont bénéficient les marchés pré- émergents de la région vont probablement devenir moins favorables, à mesure que la politique monétaire des États-Unis se normalise, ce qui pourrait coïncider avec des besoins de refinancement accrus dans de nombreux pays de la région. S’ils entendent transformer la reprise actuelle en une croissance suffisamment durable et forte pour améliorer le niveau de vie et répondre aux besoins sociaux, les États doivent prendre des mesures pour réduire les vulnérabilités et augmenter leur potentiel de croissance à moyen terme. La dette publique doit être contenue par une politique budgétaire prudente, et la politique monétaire doit privilégier une inflation peu élevée. Les pays doivent poursuivre l’application de réformes visant à réduire les distorsions du marché, à promouvoir un environnement propice à l’investissement privé, et à renforcer la mobilisation des recettes afin de donner aux États les moyens d’investir dans le capital matériel et humain, tout en protégeant les dépenses sociales même en période d’assainissement des finances publiques. Les priorités et l’échelonnement des réformes dépendront des caractéristiques propres à chaque pays et de la solidité de leurs facteurs économiques de base.