Le ministre du Tourisme, de la culture et des sports, Oswald Homéky, a remis un chèque de 20 millions FCFA au cinéaste béninois Sylvestre Amoussou. Ceci en guise de reconnaissance de la nation à l’Etalon d’argent que celui-ci a reçu au Festival panafricain de cinéma de Ouagadougou en 2017. Dans l’exercice de l’éditorial de ce jour, je m’en vais renseigner sur les retombées positives que ce geste aura sur le monde du cinéma béninois.
L’univers culturel en général et cinématographique en particulier est désormais investi des attributs qui lui manquaient pour jouer sa partition dans la course au développement de la République du Bénin. Mus par le désir soudain de se voir décerner une reconnaissance telle Sylvestre Amoussou, les acteurs du monde du 7ème art, sont désormais convaincus des conditions à remplir pour mériter les éloges du peuple. En effet, en récompensant le cinéaste béninois qui a hissé haut le drapeau national au Fespaco 2017, le ministre Homeky a sonné la mobilisation dans l’univers du cinéma demeuré un peu trop longtemps dans l’ombre des autres sous-secteurs de la culture. Et le message est clair. Point n’est besoin de se faire applaudir au Bénin pour se dire fort. Il faut faire l’honneur du pays à l’étranger et le tour est joué. Oswald Homeky aurait pu choisir de reconnaitre les mérites d’autres cinéastes non moins méritants qui s’usent à insuffler une certaine vitalité à ce sous-secteur qui peine à s’imposer non seulement au plan national mais aussi dans la sous-région. Pour preuve, les productions de Nollywood, ghanéennes, ivoiriennes et même burkinabé sont les plus vues par les cinéphiles béninois. Mais le jeune ministre, dans sa volonté de promouvoir le 7ème art a eu l’intelligence de récompenser quelqu’un dont les mérites ont été reconnus au plan sous régional. Ce faisant, le ministre de la Culture lance un appel à tous les cinéastes béninois. C’est comme qui dirait : si le monde reconnait vos mérites, nous vous récompenseront.
La bienséance aurait voulu que ce soit le ministère de la Culture qui prenne les devants et récompense les acteurs du cinéma avant que ceux-ci ne se fassent applaudir au plan national. Mais dans un passé récent, cette manière de faire a montré ses limites. En effet, il aurait suffi de récompenser un cinéaste en fonction de ses œuvres ou autres critères que toute la panoplie d’acteurs du domaine se mettrait à revendiquer une hypothétique reconnaissance. Mais puisque l’élément sur lequel le ministre Homeky se base pour reconnaître les mérites de Sylvestre Amoussou est une distinction sur le plan international, les cinéastes qui voudront bénéficier de la grâce du gouvernement n’auront qu’à décrocher des titres et récompenses en dehors du Bénin. Là, plus question de magouille ou d’affairisme.
Les acteurs du 7ème art béninois sont désormais contraints de se conformer aux normes en vigueur autant dans la sous-région que dans le monde entier. Plus question de produire des films et autres avec pour cible le peuple béninois ou une communauté donnée pour prétendre à l’accompagnement de l’Etat. Mieux, les acteurs de ce sous-secteur de la culture seront obligés de se conformer aux règles du professionnalisme. Le cinéma cessera ainsi d’être populaire pour arpenter les durs sentiers qui mènent vers l’excellence. Les acteurs, auteurs et producteurs travailleront certes davantage. Mais ils y gagneront aussi. Car, l’objectif visé est simple : décrocher des prix à l’international. Ce faisant, c’est le Bénin entier qui gagne. Les acteurs du domaine s’en verront plus sollicités, récompensés et leurs cachets grimperont au fur et à mesure qu’ils travailleront davantage. Les acteurs des séries ‘’Ma famille d’abord’’ et ‘’Les bobodiouf’’ ont décroché des contrats grâce à leurs prestations dans ces séries. Et les producteurs ont gagné pas mal d’argent avant que les bouquets Canal+ ne diffusent leurs œuvres. En clair, le geste de Oswald Homeky peut sembler anodin pour une raison ou une autre. Mais le message envoyé au monde du cinéma béninois est fort. Et le Bénin peut désormais s’attendre à des distinctions sur le plan international dans le sous-secteur du cinéma. Car le béninois fera tout pour se faire récompenser chez lui. Or, avec le ministre Homeky, il faut se faire reconnaitre ses mérites au plan international avant de prétendre à des faveurs au plan national. Une excellente manière de promouvoir non seulement la qualité dans le cinéma mais aussi le Bénin.