(Un marché commun de 1,2 milliard de consommateurs)
La Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) est une mine d’or permettant aux opérateurs de booster leurs chiffres d’affaires, selon diverses études. Pour bénéficier des avantages de cette zone, les entrepreneurs africains ont l’obligation de prendre connaissance des conditions nécessaires.
Abdul Wahab ADO
En Afrique, le secteur de l’agriculture et de l’agro-industrie constituent le deuxième secteur à haut potentiel qui offre d’immenses opportunités aux entreprises intéressées. Car, le commerce intra-africain des produits agroalimentaires devrait augmenter de 574 % d’ici 2030 si les droits de douane sont éliminés dans le cadre de la ZLECAf. Selon le World Economic Forum, la Zone de libre-échange continentale africaine offre aux entreprises locales et étrangères l’accès à une large base de consommateurs dont les dépenses atteindront 6700 milliards de dollars d’ici 2030. Quelle aubaine pour les entrepreneurs ! En effet, dans un rapport publié par le World Economic Forum, quatre secteurs offrent d’énormes opportunités aux investisseurs intéressés par la ZLECAf. Il s’agit de l’industrie automobile, l’agriculture & l’agro-industrie, l’industrie pharmaceutique et les transports & logistique. Le rapport indique que la ZLECAf permettra d’accélérer le commerce intra-africain, de contribuer à la transformation structurelle des économies africaines et de développer « les chaînes de valeur régionales et locales, créant ainsi de nouvelles dynamiques commerciales qui offrent aux entreprises locales et étrangères l’accès à un marché commun de 1,2 milliard d’habitants dont les dépenses combinées (consommateurs et entreprises) atteindront 6700 milliards de dollars par an d’ici 2030 ».
L’industrie automobile, l’autre potentiel vierge en Afrique
Dans le marché commun, l’industrie automobile en Afrique constitue l’un des secteurs « à fort potentiel » qui devraient connaître une accélération rapide de la production et des volumes d’échanges commerciaux pour répondre à une forte demande, alimentée par l’augmentation des revenus des populations locales. Selon les études de l’OMC, la taille du marché automobile du continent devrait passer de 30,44 milliards de dollars en 2021 à 42,06 milliards de dollars en 2027 grâce à la hausse de la demande, qui est actuellement essentiellement satisfaite par l’importation de véhicules d’occasion. Les constructeurs automobiles pourront en effet implanter des usines d’assemblage dans un pays tout en étant en mesure de cibler une large base de consommateurs et de profiter des droits de douane réduits sur les intrants locaux comme l’aluminium au Mozambique et le caoutchouc en Côte d’Ivoire.
L’industrie pharmaceutique, le plus grand atout
Outre l’industrie automobile, l’industrie pharmaceutique constitue pour sa part un secteur qui présente plusieurs opportunités pour les investisseurs locaux et étrangers. Le secteur de l’industrie pharmaceutique en Afrique devrait enregistrer un taux de croissance annuel moyen de 5,13 % entre 2022 et 2027. Le continent compte actuellement 600 sites de production de médicaments conditionnés qui sont fortement concentrés dans 8 pays (80%). Pour ce qui est du transport, la majorité des exportations intra-africaines sont actuellement transportées par voie terrestre. Selon les projections, la mise en œuvre de la ZLECAf devrait augmenter la demande de fret intra-africain de 28 %, ce qui entraînera une demande de près de 2 millions de camions, 100 000 wagons ferroviaires, 250 avions et plus de 100 navires d’ici 2035.
Si plusieurs études réalisées montrent les atouts de la ZLECAf, le continent africain peut se passer de l’Aide au développement dans la mise en œuvre des réformes et engagements par les décideurs. Ainsi, les pays africains peuvent devenir des compétiteurs mondiaux et bénéficier de la ZLECAf en investissant dans des infrastructures essentielles, en promouvant l’innovation et la technologie.
Les aides publiques au développement s’amenuisent au fil des temps. Car, l’économie mondiale est actuellement confrontée à des défis sans précédent : guerres commerciales, perturbations des systèmes de transport et de logistique, chocs liés à la pandémie de la COVID-19, tensions géopolitiques telles que le conflit actuel entre la Russie et l’Ukraine et ses ramifications pour la sécurité alimentaire et le prix du pétrole, ainsi que l’impact du changement climatique où l’Afrique est confronté aux déficits de financement vert.
Avec la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) il y a une lueur d’espoir pour les entreprises à travers le continent. D’ailleurs, le forum commercial de la ZLECAf, qui s’est tenu au Cap, en Afrique du Sud, du 16 au 19 avril dernier, a rassemblé plus de 1 000 décideurs politiques, chefs d’entreprise et acteurs clés pour discuter du potentiel de cette initiative ambitieuse. Le débat en cours sur l’efficacité du multilatéralisme, en particulier face aux changements économiques et géopolitiques mondiaux, souligne l’importance de trouver des solutions nationales aux problèmes nationaux et continentaux.
La ZLECAf devrait stimuler le commerce intra-africain de 52,3 % d’ici 2025, augmenter les revenus de l’Afrique jusqu’à 450 milliards de dollars d’ici 2035, selon le FMI, et sortir 30 millions d’Africains de l’extrême pauvreté. Cependant, le commerce intra-africain ne représente actuellement que 15 % du commerce total du continent, contre 58 % en Asie et 67 % en Europe. Il est donc nécessaire pour les entrepreneurs de prendre leurs responsabilités pour bénéficier des atouts de la ZLECAf.
Par ailleurs, la ZLECAf est en vigueur depuis deux ans, et 2023 a été désignée » Année de la ZLECAf : accélération de la mise en œuvre de la zone de libre-échange continentale africaine » par l’Union africaine. Mais beaucoup de défis restent encore à relever.
Le déficit de financement des infrastructures stratégiques
La route du développement passe par les routes, dit-on. Le continent africain est confronté aux problèmes d’infrastructures pour faciliter les échanges et transports commerciaux. Dans ce sens, le Forum des affaires de la ZLECAf a récemment été organisé. Les participants avaient discuté de l’importance de saisir les opportunités et les investissements créés par un marché africain unique, mais il a été souligné la nécessité d’améliorer les infrastructures du continent, qui nécessitent 130 à 170 milliards de dollars par an. Selon les études, il existe un déficit de financement de 68 à 108 milliards de dollars, ce qui fait que seulement 34 % de la population a accès à l’électricité et que 40 % vit à plus de 5 km de la route praticable en toute saison la plus proche. Ces défis contribuent à des coûts logistiques élevés, qui peuvent représenter jusqu’à 40 % du coût des échanges de marchandises entre les nations africaines.
Important rôle des institutions sous régionale
Pour l’atteinte des objectifs de la ZLECAf, une part importante revient aux institutions africaines à partir de l’Union Africaine et des autres regroupements régionaux. Dans ce sens, l’AUDA-NEPAD travaille avec les parties prenantes pour développer des industries multisectorielles en Afrique, y compris l’agro-transformation, la fabrication (en particulier les produits pharmaceutiques), les technologies vertes et le développement des minéraux. En outre, l’AUDA-NEPAD fait progresser les voies alternatives vers la croissance économique, telles que les industries sans cheminées, y compris les industries de l’économie bleue, et les services commercialisables tels que le tourisme et les TIC. Ces industries ont pris de l’ampleur en Afrique et leur développement peut contribuer à créer des emplois, à stimuler la productivité et à promouvoir une croissance économique durable.
Le forum a appelé à une augmentation des investissements en Afrique pour produire des biens qui répondent aux normes internationales et qui sont compétitifs sur les marchés mondiaux.
La plateforme a également reconnu que l’élimination des barrières commerciales dans le cadre de la ZLECAf permettra aux pays participants de développer leurs avantages comparatifs, d’accroître la productivité et d’améliorer la qualité de leurs biens et services.
En promouvant l’innovation et la technologie, en investissant dans les infrastructures essentielles et en améliorant la qualité de leurs produits, les pays africains peuvent se positionner en tant que concurrents mondiaux et profiter des opportunités offertes par la ZLECAf.
S’il est essentiel de s’attaquer aux obstacles qui entravent le commerce transfrontalier, il est tout aussi important d’encourager les producteurs à améliorer le coût et la qualité de leurs produits grâce à l’innovation et aux mises à niveau technologiques.
Cela leur permettra d’acquérir des avantages comparatifs dynamiques et d’être plus performants que leurs concurrents, ce qui peut aider à surmonter l’idée selon laquelle seule une petite proportion d’entreprises africaines (environ 20 %) peut produire régulièrement des produits de haute qualité à grande échelle. Le commerce numérique en Afrique a été l’un des principaux sujets de discussion lors du Forum d’affaires de la ZLECAf, et il gagne rapidement du terrain. Le continent connaît une augmentation de l’adoption des technologies numériques dans diverses industries, avec un intérêt croissant pour les plateformes de commerce électronique, les solutions fintech, l’argent mobile et d’autres outils numériques qui transforment la façon dont les affaires sont faites sur le continent. Cela libérera le potentiel du commerce numérique en Afrique et permettra aux entreprises, en particulier les petites et moyennes entreprises, d’étendre leur portée et de puiser dans de nouveaux marchés.
Pour soutenir cette croissance, l’AUDA-NEPAD est engagée dans diverses initiatives qui favorisent l’engagement et l’investissement du secteur privé, l’innovation, le développement technologique, la collaboration, les partenariats et le renforcement des capacités pour la ZLECAf. Noter que l’AUDA-NEPAD est le bras armé de l’Union africaine en matière de développement, selon Nardos Bekele-Thomas, Directrice générale de l’AUDA-NEPAD. L’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) prévoit que la production manufacturière de l’Afrique pourrait passer de 500 milliards de dollars actuellement à 1,7 trillion de dollars d’ici 2030, ce qui pourrait créer jusqu’à 14 millions d’emplois. Pour surmonter les défis associés à la production axée sur les matières premières, il est essentiel de promouvoir des rampes de lancement industrielles essentielles. C’est dans l’union que les défis seront atteints.