- Plus de 45000 hectares récupérés au profit des populations
- La formation de 7.000 jeunes aux métiers techniques annoncés
Mise en place trois (03) décennies déjà, l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) s’est, de par ses engagements multisectoriels, révélée être un atout clé dans le développement des Etats membres. Agriculture, élevage, énergie, numérique, infrastructures routières, éducation, santé…, elle n’a manqué à aucun de ses rendez-vous, même si les attentes restent toujours immenses. Comment s’y est-elle prise et quelles sont ses réalisations concrètes ? Abdoulaye Diop, Président de la Commission de l’Uemoa, a livré, à propos, l’essentiel dans l’émission périodique de l’institution, « L’invité de l’intégration ».
Qu’est-ce qui a motivé les Chefs d’Etat et de Gouvernement à créer l’UEMOA le 10 janvier 1994 ?
L’Union économique et monétaire ouest-africaine avait comme principal objectif d’améliorer les conditions de vie de ses populations, d’améliorer le mieux-être, le bien-être de ses populations. C’était l’objectif fondamental qui a été donc fixé par les pères fondateurs et par le traité de notre Union. Dans ce domaine, il a été décidé de mener des politiques sectorielles d’envergure dans tous les domaines et ce sont ces politiques sectorielles qui devaient permettre de prendre en charge les préoccupations de nos populations, de prendre en charge les préoccupations de façon plus générale, des acteurs de la vie économique et sociale et propulser notre Union, nos économies, nos Etats dans une ère de développement.
En matière de politiques sectorielles, quel bilan peut-on faire des interventions de la Commission de l’Uemoa ?
Nous avons pu au niveau de l’Union faire beaucoup de choses, particulièrement dans les domaines de l’agriculture. Il y a eu des acquis certains. Dans le domaine de l’énergie, nous avons pu faire beaucoup de choses, dans le domaine de l’environnement, des actions très importantes, de même que dans le domaine de la santé, de l’éducation de l’enseignement supérieur, et dans d’autres domaines comme le tourisme, la culture, etc. Au même titre que les États, la Commission travaille de façon multisectorielle pour prendre en charge tous ces aspects. Pour revenir à la question de l’agriculture qui est un secteur clé et qui est reconnu comme étant un secteur par lequel doit passer le développement de nos Etats, la Commission a eu à faire bien-sûr en rapport avec les Etats, des réformes majeures mais en même temps des projets d’envergure qui ont été initiés et qui ont permis aujourd’hui d’aménager et de récupérer par exemple plus de 45000 hectares au profit de nos populations. Toujours dans ce domaine, dans beaucoup de nos pays, on a des problèmes de conservation des récoltes et donc nous avons développé au niveau de notre Union à travers la Commission, bien-sûr, des investissements dans le domaine du stockage. Dans ce domaine aussi, nous avons développé des capacités de stockage qui aujourd’hui font plus de 25.0000 tonnes. Cela est important et permet de conserver les productions pour les populations, les producteurs mais également permet de maintenir des prix rémunérateurs pour ces producteurs dans nos zones rurales.
Nous avons eu aussi à développer des aménagements hydrauliques multi-usages, des investissements qui permettent de produire de l’eau pour l’irrigation pour le bétail, etc. Cela a permis dans beaucoup de zones de notre Union d’améliorer les conditions de vie des populations. Toujours dans ce domaine, nous avons modernisé des abattoirs parce que c’est important pour développer le cheptel. Des marchés à bétail, on en a fait aussi dans un certain nombre de pays : Burkina, Mali, Niger. Donc nous avons développé ces marchés à bétail pour améliorer la production et appuyer les éleveurs dans leurs activités de tous les jours.
Quels sont les autres secteurs majeurs dans lesquels la Commission s’est investie ?
Dans le domaine de l’énergie, nous avons eu aussi à initier des projets et réformes. Nous avons eu à mettre en place des investissements qui ont permis d’améliorer les systèmes d’interconnexion entre les pays. Nous avons eu à mettre en place aussi des mini-centrales qui ont fondamentalement amélioré les conditions de vie des populations dans beaucoup de pays de notre espace communautaire. Nous continuons dans ce domaine pour améliorer l’offre d’énergie à la fois en quantité en qualité, mais également en essayant d’avoir les prix les plus abordables possibles. Dans ce sens, nous sommes en train de développer le marché régional de l’énergie, un marché où on confrontera l’offre et la demande d’énergie. Nous essayons de le faire progressivement à travers la mise en place d’un système d’information énergétique de l’Uemoa. Il est fondamental que cet aspect de l’énergie soit développé, parce que l’énergie, c’est un des éléments qui améliore les conditions de vie, le bien-être des populations dans leur vie quotidienne, chez elles, dans leur maison, mais également dans leur système de production.
Le secteur des transports est également un secteur essentiel quand on sait que nous sommes dans une union douanière et on va vers le marché commun, donc la circulation des biens et des personnes est quelque chose de capital. Dans ce domaine, nous avons développé ce que nous appelons les postes de contrôle Juxtaposés qui sont des postes de contrôle aux frontières de deux pays et qui permettent sur place de faire l’ensemble des formalités et de faciliter le déplacement des populations. Pour préserver aussi l’infrastructure routière qui est capitale pour le transport de marchandises avec de gros porteurs, à travers le fameux règlement 14, nous avons développé des stations de pesage que l’Uemoa a financé. Ces stations de pesage permettent de garantir que les camions, en tout cas les véhicules qui passent, ne sont pas en surcharge pour éviter de dégrader les routes. C’est des investissements de l’Uemoa qui ont été mis en place pour sauvegarder l’infrastructure routière qui coûte très cher. Tenant compte de l’importance de cette libre circulation des personnes et des biens, la Commission a financé des études routières au profit des différents Etats pour tracer des corridors entre les différents Etats et permettre de fluidifier le transport dans notre espace sous régional. Et ça, nous le faisons parfois avec notre organisation sœur qui est la CEDEAO.
Qu’est-ce qui a été fait pour ce qui est du développement humain ?
Dans les autres secteurs de la vie économique et sociale, nous avons fait beaucoup de choses. Dans le domaine de la santé, nous sommes en train de faire des choses importantes. C’est pourquoi au niveau de la Commission, en relation avec les Etats, on a pu prendre des décisions fortes pendant la période Covid que nous avons vécue. Dans le domaine de l’éducation, nous avons fait des réformes importantes. Je citerai juste le BAC (Baccalauréat) communautaire qu’on a mis en place pour permettre des échanges inter-universels dans notre espace. Dans le domaine du tourisme, nous avons fait beaucoup de choses. Dans le domaine culturel, nous avons eu à faire des choses importantes. Récemment nous avons adopté un texte pour améliorer les conditions de vie des artistes dans notre espace, sur la « copie privée ». Ce texte est une rupture avec tout ce qu’on a connu jusqu’à présent. Et s’il est bien appliqué, et nous veillons à cela, les acteurs, les artistes dans notre espace communautaire devraient mieux vivre de leur art. Ils ont tous salué d’ailleurs ce texte.
Quelle évaluation faîtes-vous de l’approfondissement des questions de macro-économie et de surveillance multilatérale ?
Faire le bilan des 30 ans, c’est également revenir à deux piliers fondamentaux de ce qui a fondé l’UEMOA, c’est-à-dire le « marché commun » et « l’union douanière ». Nous avons eu à mettre en place très rapidement, dès 2000, le TEC (Tarif Extérieur Commun) qui a été un succès et qui a permis aussi de concevoir très rapidement le Tarif Extérieur Commun de la CEDEAO de l’autre côté. Ce tarif extérieur commun est en place depuis 2000 et a permis de fluidifier les échanges au niveau communautaire, même si nous avons encore des efforts à faire. Nous avons un tarif extérieur commun, nous appliquons le même tarif à l’entrée du territoire communautaire dans tous les États membres de l’Uemoa. On essaie de traiter toutes nos populations de l’Union qui font aujourd’hui plus de 130 millions d’habitants de la même façon vis-à-vis de ce tarif. Les acquis que nous avons dans ce domaine devraient être un atout pour nous dans la perspective de la Zlecaf.
Pour les prochaines années, quelles sont les priorités de la Commission de l’Uemoa ?
Ce que nous comptons faire pour les prochaines années, c’est de consolider encore une fois comme je l’ai dit, les piliers de l’intégration. Nous allons continuer à les consolider parce nous sommes convaincus que c’est le préalable à tout développement communautaire, à tout développement de nos Etats. Donc, le renforcement, la consolidation du marché commun de notre Union ; la consolidation, le renforcement des politiques économiques, sectorielles et les réformes structurelles dans nos économies. Les acquis des 30 dernières années ont permis d’avoir des économies résilientes qui ont pu aussi croître pendant cette période-là.
Nous allons continuer à travailler en relation avec les États pour permettre aux jeunes d’avoir de la compétence, d’avoir un métier. Et c’est pourquoi le volet formation professionnelle est très important pour nous et nous avons mis en place un système de bourse au niveau de l’UEMOA qui permet de financer des cycles entiers. Nous allons renforcer cela. Nous avons initié des projets très importants. Il y a le PROFOR qui est un projet dans ce domaine-là pour la formation professionnelle des jeunes que nous avons initiée avec des partenaires techniques et financiers et actuellement il y a un des partenaires avec qui nous allons signer très prochainement une convention qui va permettre de former dans notre espace plus de 7000 jeunes dans des métiers techniques.
Un autre volet sur lequel nous mettrons l’accent, c’est le secteur privé. Nous sommes convaincu qu’on a besoin d’un secteur privé fort pour impulser davantage de croissance, offrir plus d’emplois, parce que la création de la richesse c’est d’abord le métier, la fonction du secteur privé. Nous avons initié des textes importants dans ce domaine-là nous avons une stratégie en cours pour le développement du secteur privé. Nous avons des textes pour développer les partenariats publics-privés. Tout cet ensemble est en concertation avec les secteurs privés sous régionaux. Donc le secteur privé devra jouer encore un rôle plus important dans le développement économique de nos Etats.
Par Sylvestre TCHOMAKOU