Face à la pandémie du coronavirus (covid-19) les pays africains avec des armes totalement en dessous de la norme minimale mettent différemment en place des mesures de riposte. En tant qu’une des mesures, le confinement apparaît très salutaire pour faire face à l’urgence dans de nombreux pays développés. Mais, il peut se révéler suicidaire pour les pays les plus pauvres d’Afrique.
Si la pandémie s’inscrit dans la durée, la plupart des pays d’Afrique n’ont ni les ressources, ni les capacités résilientes nécessaires pour soutenir les mesures de riposte et faire face efficacement au covid-19.
Dans de nombreux pays d’Afrique, comme le Burkina Faso, le Mali et le Niger en proie à la précarité économique, à l’insécurité alimentaire ou aux conflits armés, le pire est à craindre.
Dans des pays comme le Bénin et le Togo, l’économie est à dominance informelle et les marchés à ciel ouvert y jouent un rôle incontournable. Dans ces marchés, notamment ceux de Cotonou et de Lomé, des milliers voire des millions de personnes se côtoient et vivent la majeure partie de leur journée dans une promiscuité favorable à une large contamination. Au Bénin, plus de 90% de la population active vivent de l’économie informelle. La plupart de ces acteurs sont sans assurance maladie et sans sécurité sociale. Sans activité économique pendant deux à trois jours successifs, certains sont incapables de s’assurer un repas par jour. Le revenu journalier obtenu suffit à peine pour s’assurer le minimum vital par jour.
Sans mesures d’accompagnement, peut-on et doit-on, confiner des populations vivant dans l’extrême pauvreté ou obligées de se battre chaque jour pour s’assurer un repas quotidien ?
Chaque jour Cécile A. se rend à Dantokpa (le plus grand marché du Bénin) pour y chercher la pitance quotidienne. Célibataire et mère de deux orphelins de père, Dansi K. doit faire environ 30km chaque jour pour vendre de maison en maison de la friperie afin d’assurer le pain quotidien à son ménage. Or, pour rompre la chaîne de contamination, les populations sont contraintes de rester chez elles.
A court terme, le confinement peut être une mesure palliative très nécessaire. Mais, il convient dès maintenant d’apprécier la portée et les limites des mesures de riposte au regard des capacités sanitaires et économiques des pays africains.
Si le confinement apparaît très salutaire pour faire face à l’urgence et rompre la chaîne de contamination, il peut se révéler suicidaire pour les pays les plus pauvres.
Les réponses sanitaires et les mesures d’accompagnement, en soutien à l’économie et au revenu des populations, envisagées ou mises en œuvre par des pays comme la Chine, la France, l’Allemagne et les Etats-Unis d’Amérique sont hors de portée pour la capacité budgétaire de plusieurs Etats africains pris isolement.
Covid-19 et les pays sous tension
Depuis plus d’une décennie, la situation alimentaire et nutritionnelle de plusieurs Africains est structurellement déficitaire et défaillante. Des tendances lourdes précarisent constamment la sécurité alimentaire et les Etats peinent à trouver des réponses politiques structurelles et prospectives cohérentes et efficaces. La dynamique démographique et la précarité des revenus, les chocs environnementaux et perturbations climatiques sur les systèmes agroalimentaires puis les conflits armés et leurs corolaires de mouvements migratoires ont déjà mis plusieurs Etats africains sous tension maximale obligés de recourir massivement à l’assistance extérieure. Que peuvent alors ces pays face au covid-19 dans un contexte de pandémie qui ébranle également les pays donateurs ? Pas grande chose, sinon donner l’impression d’agir en faisant du surplace.
En ce moment, le coronavirus met en déroute les Etats et plusieurs idées reçues des politiques économiques. Des décisions lourdes de conséquences, mais indispensables au vu du contexte, affectent fondamentalement, structurellement et durablement les économies du monde entier avec une sévérité extrême pour les pays ayant déjà besoin d’assistance humanitaire.
Même si pour l’instant plusieurs africains ont la conviction que la protection divine les accompagne et que leur santé bénéficie d’une immunité particulière, la sagesse recommande d’observer les règles élémentaires d’hygiène : se laver régulièrement les mains à l’eau et au savon et garder une distance minimale d’un mètre entre deux individus.
Il faut espérer une évolution satisfaisante de la situation dans un délai assez court, tout en se préparant psychologiquement pour le pire. Les pays comme ceux du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest ne pourront pas résister longtemps au coronavirus et ses implications économiques.
Les mesures de lutte contre la pandémie (confinement, distanciation sociale, restrictions à la circulation des personnes, fermeture des frontières, isolement, etc.) sont contreproductives pour les pays à faible économie et les populations déjà sous tension (pauvres, extrêmes pauvres ou vivant en insécurité alimentaire).
Il est impératif de mettre en place une meilleure coordination des réponses, tout au moins au niveau régional. Les organisations intergouvernementales comme l’UEMOA, la CEDEAO, l’Union africaine voire les Nations Unies sont interpelées et invitées à avoir une pensée spécifique pour les populations ayant besoin d’assistance alimentaire accrue dans ces moments difficiles.
Même pour laver régulièrement les mains à l’eau et au savon, il faut avoir accès à l’eau potable et être capable d’acquérir du savon. Prenons soin de nous et de nos proches, et gardons la foi en l’avenir.
Abel Gbêtoénonmon
Econews-AfriPerf
Afrique Performance (AFRIPERF)
Abel GBETOENONMON
Economiste-Planificateur/ Journaliste-économique
Expert en Gouvernance et politiques économiques
Afrique Performance (AFRIPERF)
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