La décentralisation au Bénin a connu plusieurs péripéties et facette depuis le 1er août 1960, date à laquelle le Bénin a connu son indépendance. Quels sont les points forts et les points faibles que l’on peut noter depuis son avènement ?
TAMPOUNHOURO T. J. Blaise
La décentralisation au Bénin continue son chemin malgré les différentes péripéties qui ont longuement jalonné sa marche. Commencée depuis la période coloniale, elle a connu la mise en œuvre de plusieurs lois. En 1955 déjà, on parlait de la loi du 18 novembre 1955 relative à la réorganisation municipale en Afrique occidentale française, qui instituait des communes de plein exercice (CPE) dans les localités de Porto Novo, Cotonou, Ouidah, Abomey et Parakou. Il y a eu aussi, le décret n° 57-461 du 4 avril 1957 autorisant les chefs de territoire. Ce décret a permis de créer par arrêté pris en Conseil de gouvernement et après avis de l’assemblée territoriale, des collectivités rurales dotées de la personnalité morale et de l’autonomie financière. Mais, après l’indépendance du Bénin, le processus a connu quelques blocages et a fait un peu du surplace. « La décentralisation est un long processus. Depuis 1960 au Bénin, il a connu différentes phases. Actuellement, ce à quoi l’on pense, c’est le transfert de compétences, la prise des décrets d’application, le transfert des ressources comme le FADec » a déclaré un conseiller communal rencontré à Natitingou. Par la suite, les différents gouvernements et régimes politiques d’inspiration marxiste qui se sont succédés à la tête de l’Etat béninois ont maintenu une organisation administrative très centralisée basée sur le commandement. A ce niveau la loi du 10 octobre 1981 instituait bien trois niveaux d’administration : l’Etat, la province et le district, mais l’encadrement du parti unique empêchait toute décentralisation dans les faits. Ce qui fait que la décentralisation et l’idéologie politique des gouvernements ont des impacts forts sur le processus.
Les lois fortes qui encadrent le processus de décentralisation
Au Bénin, il y a deux lois qui constituent des avancées notables au niveau du processus de décentralisation. Il y a la loi 97-029 portant organisation des communes et la loi 98-007 portant régime financier des communes. Grace à ces deux lois, le Bénin a réglé beaucoup de problèmes, affirme, un agent de la préfecture de Natitingou sous anonymat. « Ces deux lois cadrent tout, il y a la tutelle, les problèmes de destitutions, le contrôle de légalité des actes pris par les Maires, le budget, le 12ème provisoire, ect… Grace à ces deux lois, les communes existent et sont animées quotidiennement sans qu’on ait des problèmes juridiques sur tel ou tel aspect de gouvernance » a ajouté un autre chef service rencontré à Natitingou. La loi 98-007 du 15 janvier 1999 quant à elle détaille les aspects liés aux finances dans les communes.
La problématique du transfert des ressources
Le FADeC est un exemple de transfert de ressources financières de l’Etat central en direction des communes. Mais, il faut que les ressources transférées soient conséquentes pour que cela puisse impacter significativement le développement des communes du Bénin. C’est l’avis d’un conseiller communal rencontré à Natitingou. Pour lui, les fonds transférés ne suffisent pas à sortir les communes de leur léthargie. A ce jour, les ressources transférées aux communes n’atteignent pas même pas 30 % du budget général de l’Etat. « Hors les communes ont un gros besoin de financement pour la mise en œuvre de leur plan de développement communal. C’est le point sur lequel l’accent doit être mis, si l’on veut réellement que le pays décolle dans tous ses aspects » a-t-il ajouté. Espérons que cette question du transfert des ressources financières soit réglée pour qu’on assiste à un véritable développement à la base du pays.
Voici quelques lois qui contribuent à donner vie au processus de décentralisation du Bénin.
· Loi n° 97-028 du 15 janvier 1999 portant organisation de l’Administration territoriale de la République du Bénin
· Loi n° 97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin
· Loi n° 98-007 du 15 janvier 1999 portant régime financier des communes en République du Bénin Loi n° 98-005 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes a statut particulier
· Loi n° 98-006 du 9 mars 2000 portant régime électoral communal et municipal en République du Bénin
· Loi n° 2007-28 du 23 novembre 2007 fixant les règles particulières applicables aux élections des membres des conseils communaux ou municipaux et des membres des conseils de villages ou quartiers de ville en République du Bénin Loi n° 2009-17 b du 13 août 2009 portant modalités de l’intercommunalité au Bénin
Photo : Ministère de la décentralisation
Légende : Une vue partielle du ministère de la décentralisation
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Commerce : Un pays de transit où l’export est dominant
Depuis les indépendances, le commerce au Bénin apparaît comme l’une des principales branches de l’activité économique du pays notamment, par sa participation relativement élevée à la formation du PIB et également par les liens étroits qu’il entretient avec tous les secteurs d’activités.
Une part belle au commerce extérieur. Globalement, le commerce extérieur formel du Bénin est resté caractérisé durant de longues années, par un déficit structurel de sa balance commerciale. Ce déficit qui remonte au début des années 1950 n’a cessé de croître jusqu’en 2004. Le niveau relativement élevé des échanges extérieurs du Bénin à l’époque, s’expliquait en grande partie par le niveau des activités de réexportation. Quant aux importations du Bénin, elles restent dominées par les produits alimentaires, les biens d’équipement, les textiles les produits énergétiques et les produits pharmaceutiques.
Ouverture aux échanges extérieurs
Le Bénin est ouvert aux échanges extérieurs depuis des lustres, le commerce international représentant aujourd’hui 67,6% du PIB (Banque mondiale, mars 2019). C’est par le port de Cotonou que transitent la grande majorité des biens échangés, le gouvernement cherchant à en développer les capacités. En 2017, les exportations de biens et de services ont augmenté de 8,2% en glissement annuel, et représentent 27,3% du PIB (Banque mondiale). Dans un même temps, les importations ont augmenté de 10,8% pour atteindre 40,3% du PIB. Aujourd’hui, le Bénin exporte essentiellement du coton (principal produit d’exportation), des noix de cajou, des noix de coco, des noix du Brésil, du karité, des bateaux, du ciment, des produits textiles et des fruits de mer à destination de l’Inde, du Niger, de la Malaisie, de Singapour, du Vietnam et du Bangladesh. Les principaux produits importés sont les denrées alimentaires (riz, viande), les produits pétroliers, l’énergie, les médicaments et les biens d’équipement en provenance de la France, de Chine, d’Inde, de la Thaïlande, et des Pays-Bas. Le pays est également très actif en matière de réexportation, principalement vers le Nigeria.
Rôle dominant des produits agricoles
Au Bénin, le secteur informel a pris une longueur d’avance et tient encore tête au secteur formel malgré les efforts des différents régimes qui ont gouverné le pays depuis 1960. Ainsi, d’après le troisième Recensement général de la population et de l’habitation, en février 2002 (RGPH3, 2002), l’occupation de la population béninoise est de 94,30% dans le secteur informel, 2,68% dans le secteur formel d’Etat et 2,42% dans le secteur formel privé (Insae, 2003). En effet, l’activité principale lors de cette transaction informelle au Bénin est la vente illicite des produits pétroliers frauduleusement importés du Nigeria. Les relations commerciales entre le Bénin et le Nigeria sont anciennes et ont pris la forme du marché parallèle depuis la fin des années 80. Ainsi, à la faveur du prix, le commerce informel des hydrocarbures, contrôle près de 80%, de la part du marché au Bénin et donne satisfaction à une majorité de la population (MIC, 2006).
Partenaires commerciaux à l’exportation
Les principaux clients du Bénin ont varié durant la période de 1960 à 2002. Dans les années 60, le Bénin exportait vers les pays comme la France, l’Italie, les Pays-Bas, l’Allemagne et le royaume Uni. Les années 80 ont vu par ailleurs les Etats-Unis, le Taiwan, le Portugal et le Singapour devenir les principaux clients du Bénin (Bignon S. Batonon, UAC/ENEAM – DTS 2007). Entre 1992 et 1999, le Brésil a occupé la première place des clients du Bénin avec 16,4% des produits exportés, suivi du Maroc à 7,2% et du Nigeria. A partir de 2000, le premier principal client du Bénin est l’Inde avec 31,5% des exportations totales en 2000 et respectivement 29,9% et 17,6% en 2001 et en 2002. La part des exportations vers les pays de la sous-région reste encore très faible. Très tôt branchés sur le commerce international (dès le XVIIe siècle), les entités territoriales du midi et du septentrion de la future colonie du Dahomey, le Dahomey et le Bénin, ont de tout temps participé aux échanges mondiaux. (Bignon S. BATONON, UAC/ENEAM – DTS 2007).
A l’image du commerce extérieur du pays, l’exportation du Bénin est extravertie et basée sur les produits d’une seule culture de rente : hier le palmier à huile (1890-1975), aujourd’hui le coton (depuis les années 80). Sauf l’exception que représente la présence du pétrole dans les exportations au cours des années 80 et début 90, l’essentiel des produits exportés sont d’origine agricole et ces matières premières ne subissent qu’une semi- transformation locale visant à rendre leur transport vers l’extérieur plus aisé ; ceci explique l’atrophie du secteur industriel principalement caractérisé, depuis la colonisation (1894), par des huileries et des usines d’égrenage à faible valeur ajoutée. A partir de 1937, sa structure était devenue presque stationnaire avant de connaître une remontée après la seconde guerre mondiale en raison de la croissance exceptionnelle des besoins en provenance du Dahomey (huile de palme, coton, arachide, café, autres). Du fait des effets de la guerre, le volume des exportations quant à lui avait atteint le pic en 1936 (Rapport 2004 sur le commerce extérieur)
Durant la période coloniale, le Dahomey s’était spécialisé dans la fourniture des produits de palmiers à huile au sein de l’ensemble de l’AOF. Ces produits constituèrent durant toute cette période et même au-delà, entre 83% et 90% du total des exportations. Les 10% ou 15% restants étaient constitués de produits d’appoints à savoir : arachide, coprah, coton, kapok, ricin, karité et café. Avec le pétrole brut à partir de 1983, les exportations ont dépassé 200 000 tonnes avant de revenir à leur niveau habituel entre 1983 et 1993 suite à la crise économique de 1989. C’est avec la dévaluation du franc CFA intervenue le 11 janvier 1994 que les quantités exportées ont connu une remontée pour atteindre un niveau légèrement inférieur à celui des années 1983- 1988.
Par ailleurs, au titre des changements, il y a la substitution des huiles de palme par le coton, la réduction de la gamme des produits exportés et la réexportation de certains produits importés. A la différence des Pays émergents d’Asie, qui, à la faveur de la mondialisation sont devenus des exportateurs de biens manufacturés et de services, la structure des exportations du Bénin obéit toujours au schéma classique défini par la Division Internationale de Travail (DIT) au XIXe siècle, à savoir la spécialisation des nations d’Outre- mer dans la fourniture d’un ou de deux produits bruts du secteur primaire au commerce international tandis que l’Occident ( y compris les Etats-Unis) garde le monopole de l’usine, de la finance et du laboratoire ( recherche scientifique) à l’échelle mondiale. En 1993, les exportations avaient connu une baisse en valeur de 37,2% par rapport à 1932. La valeur globale des exportations à partir de 1960 a connu une évolution entrecoupée par des chutes avec néanmoins, une structure à la hausse au cours des années 1960- 1998.
La Chine, premier client du Bénin
Le bulletin d’information de l’Institut national de la statistique et d’analyse économique (Insae) publié en mars 2019, indique qu’au terme du quatrième trimestre de 2018, le Bénin a eu pour client principal, la Chine, avec 17,4% de la valeur globale des biens vendus à l’extérieur par le pays. Les principaux produits exportés vers la Chine sont le coton, pour une valeur totale de 11 552 millions FCFA pour un volume de 11 991,9 tonnes, les barres et profilés en fer ou en acier y compris les palplanches, pour une valeur de 1 704 millions de FCFA avec un volume de 5116,9 tonnes et les produits laminés plats, en fer ou en acier non alliés, non plaqués ni revêtus pour une valeur de 842 millions de francs CFA, soit un volume de 2 210,3 tonnes. De même, la Chine est en deuxième place parmi les principaux fournisseurs du Bénin avec 11,1% de la valeur totale des biens acquis à l’extérieur au titre du quatrième trimestre de l’année 2018.
Les principaux produits importés selon le bulletin de l’Insae, sont les motocycles (y compris les cyclomoteurs) et cycles, avec ou sans moteur, fauteuils roulants et autres véhicules pour invalides pour une valeur totale de 7 452 millions FCFA et un poids total de 5 330,1 tonnes. A cette liste s’ajoutent le riz pour une valeur totale de 6 568 millions de FCFA, correspondant à 25 002,3 tonnes et enfin les véhicules automobiles pour le transport de marchandises et véhicules automobiles à usages spéciaux pour une valeur de 4330 millions de FCFA avec un poids total de 3 812,9 tonnes.
D’après le bulletin de l’Insae, le Nigeria est le deuxième client du Bénin avec 13,3% de la valeur des exportations. Les viandes et abats comestibles, frais, réfrigérés ou congelés à l’exclusion des viandes et abats impropres à la consommation humaine, les graisses et huiles végétales fixes, brutes, raffinées ou fractionnées, autres que douces, sont les principaux produits que le Bénin a exportés vers ce pays au titre de ce trimestre. Les valeurs respectives sont de 5 244 millions FCFA, 3225 millions FCFA et 2 814 millions FCFA des poids respectifs de 5 448,0 tonnes, 6 198,4 tonnes et 4 789,8 tonnes.
Le troisième pays partenaire du Bénin à l’exportation au titre du quatrième trimestre de l’année 2018 est le Viêtnam avec au total, 10,2% de la valeur des exportations. Les principaux produits exportés en direction de ce pays sont le coton, pour une valeur de 9 505 millions FCFA, les fruits à l’exclusion des fruits oléagineux, frais ou secs pour une valeur de 32 millions FCFA et les verres pour une valeur de 9 millions FCFA. Il en résulte que, de 1960 à ce jour, le commerce demeure un acteur non moins important de la vitalité du tissu économique national.