(Voici le comportement financier des étudiants)
Pour financer leurs études supérieures, beaucoup d’étudiants obtiennent leurs ressources financières de plusieurs sources. Une étude du cabinet T-Ventures présente comment les étudiants parviennent à satisfaire à leur besoins, leurs sources de revenu et leur investissement. Lire les résultats de l’étude.
Les étudiants qui travaillent pour subvenir à leurs besoins démontrent de meilleurs comportements financiers que ceux qui reçoivent de l’argent de poche
Résumé
Le cabinet d’études T-Ventures a mené une étude en mai 2023 qui vise à comprendre le comportement financier des étudiants dans les universités publiques et privées de Cotonou et d’Abomey-Calavi. Le comportement financier fait référence à la façon dont une personne gère son argent, prend des décisions et traite les problèmes financiers. Ainsi, 570 étudiants dont 57% d’hommes et 43% de femmes ont été interrogés. Ils proviennent des facultés de l’Université d’Abomey-Calavi (UAC), des Ecoles Privées d’Enseignement Supérieur (EPES) et des Ecoles de Formations Professionnelles de l’UAC. Ces étudiants poursuivent les filières de l’économie et de la gestion, de la linguistique et des lettres modernes, des sciences techniques, de la polytechnique, du droit, des filières liées aux secteurs de service, de l’informatique et de l’agronomie.
La majorité des étudiants (85%) subviennent à leurs besoins grâce à l’argent de poche perçu de la famille ou des proches. Les autres sont, soit boursiers soit exercent de petits boulots ou des activités commerciales. L’ensemble des étudiants dispose d’une somme inférieure à 100 000 FCFA par mois pour se prendre en charge et estime être de bons gestionnaires. Par contre, la source de l’argent à disposition des étudiants – argent de poche vs revenu généré par une activité détermine la pratique d’épargne, d’investissement ou d’endettement. Elle influe également sur le choix du digital comme moyen d’achat ou comme canal d’investissement. Enfin, on note des comportements différents entre femmes et hommes.
- Sources d’Argent de poche
Quatre-vingt-cinq pourcent (85%) des étudiants reçoivent de l’argent de poche dès l’âge de 15 ans et jusqu’à 30 ans. Toutefois, la probabilité de recevoir de l’argent de poche se réduit sensiblement avec l’âge (87% des 15-20 ans reçoivent de l’argent de poche comparé à 50% des 30 ans et plus). Cet argent provient de la famille et des proches notamment des parents (92%), des tuteurs (6%) puis des petits-amis pour les jeunes femmes (2%).
Graphe 1 : Argent de poche reçu par les étudiants en fonction de leur âge
Source : T-Ventures, mai 2023
La catégorie d’étudiants ne recevant pas d’argent de poche développe des stratégies de prise en charge personnelle par le biais de petits boulots (77%), d’activités commerciales (11%) ou via internet (5%). Dans ce même lot d’étudiants, 7%% reçoivent des aides universitaires (bourses).
Graphe 2 : Autres sources de revenu des étudiants
Source : T-Ventures, mai 2023
- Revenus mensuels des étudiants
Le revenu mensuel des étudiants se situe principalement dans 2 tranches :
TRANCHE 1 : Moins de 50 000 FCFA. 70% d’étudiants reçoivent moins de 50 000 FCFA comme argent de poche contre 75% de ceux qui se débrouillent seuls.
TRANCHE 2 : Entre 50 001 et 100 000 FCFA. 30% de ceux qui reçoivent de l’argent de poche, se situent dans cette tranche contre 25% de ceux qui se débrouillent seuls.
- Habitudes d’achat en ligne des étudiants
Que ce soit pour des raisons financières, de qualité de produits, de distance et de gain de temps, la pratique d’achat en ligne est en plein essor : 28% d’étudiants effectuent des achats en ligne ou via une application.
Les principaux types d’achats effectués concernent les services publics (37%), la nourriture (25%), la formation (16%), et la mode (15%). L’évènementiel ne représente que 2% de ces achats. On note que les étudiants qui effectuent des achats en ligne sont majoritairement représentés par ceux qui reçoivent de l’argent de poche (75%). Ceux qui travaillent pour subvenir à leurs besoins et qui ne reçoivent pas d’aides s’y adonnent moins mais lorsqu’ils le font c’est pour commander à manger ou payer pour une formation.
Graphe 3 : Types d’achats en ligne
Source : T-Ventures, mai 2023
L’essor du numérique se manifeste également par le mode de paiement électronique – portemonnaie électronique ou carte bancaire qui s’effectue par 59% des étudiants.
- Qualité et modes de gestion d’argent
A la question de savoir s’ils gèrent bien leur argent, 81% des étudiants répondent par l’affirmative. Toutefois, les femmes ont tendance à moins se qualifier de bonnes gestionnaires (79%) que les hommes (83%).
Cette perception est testée par la culture d’épargne, l’initiative d’investissements et l’appétit pour le crédit.
- Epargne, pratiquée par plus de la moitié des étudiants
L’épargne qui consiste à mettre de l’argent de côté sert non seulement à parer à des imprévus mais également à réaliser des projets futurs. Comparativement à l’assertion de la majorité des étudiants d’être de bons gestionnaires, seuls 56% épargnent. Les femmes épargnent sensiblement plus que les hommes (respectivement 57% et 56%). Aussi, plus les étudiants sont âgés et moins ils épargnent : 59% des étudiants de 15 à 20 ans épargnent comparé à 24% de ceux âgés de 25 à 30 ans. L’autre tendance qui se dessine est que les étudiants qui travaillent pour subvenir à leurs besoins sont plus dévoués à l’épargne : 64% comparé à 55% des étudiants recevant de l’argent de poche.
Graphique 4 : Epargne des étudiants selon qu’ils reçoivent ou non de l’argent de poche
Source : T-Ventures, mai 2023
- Investissements, les nouveaux modes axés sur le digital
L’investissement permet de fructifier l’épargne afin de générer des gains à moyen ou long terme. L’investissement est encore moins bien pratiqué que l’épargne avec seulement 30% des étudiants qui investissent. De même que pour l’épargne, les étudiants ne recevant pas de l’argent de poche sont plus proactifs dans ce domaine (37%) comparativement à ceux qui en reçoivent (28%). Les femmes investissent sensiblement moins que l3s hommes : 27% vs. 32%.
Graphe 5 : Investissements des étudiants selon qu’ils reçoivent ou non de l’argent de poche
Source : T-Ventures, mai 2023
Les étudiants de Cotonou et d’Abomey-Calavi investissent principalement dans :
- les activités commerciales (34%), conformément au fait que les étudiants autonomes pratiquent le commerce, ils réinvestissent donc leurs gains dans ces activités ;
- l’agriculture (29%), de plus en plus d’étudiants se tournent vers les cultures au champ ;
- les crypto monnaies et la bourse (20%), car de nos jours les crypto monnaies sont très attractives en raison de leur grande volatilité, ce qui permet d’avoir des retours sur investissement alléchants ;
- la formation (6%) puisque c’est un moyen qui permet de s’adapter aux évolutions du marché grâce à l’acquisition de nouvelles compétences afin d’améliorer son employabilité ;
- Les terrains (1%) principalement parce que la valeur est élevée mais surtout que contrairement aux anciennes générations la priorité des jeunes n’est pas d’avoir son propre toit.
Graphe 6 : Secteurs d’investissement
Source : T-Ventures, mai 2023
- Endettement, le dernier recours en cas de difficultés financières
L’endettement désigne un emprunt auprès d’une personne ou un d’une institution financière (banque, établissement de crédit…) qui doit être remboursé selon des termes donnés. Une étude Finscope Bénin en 2018 montre que les Béninois n’aiment pas contracter des crédits. Conformément à cette tendance nationale, seuls 4% des étudiants prennent un crédit (informel) et cela, principalement, pour faire face à des imprévus (35%), pour investir (15%), pour un besoin ponctuel (15%), pour faire des approvisionnements (15%), pour la connexion internet (5%), pour payer les frais de scolarité (5%), ou par manque de moyens (10%). Les femmes s’endettent sensiblement plus que les hommes : 4% contre 3%.
Les causes d’endettement diffèrent selon le genre : les femmes s’endettent principalement pour faire face aux imprévus et pour les approvisionnements tandis que les hommes le font également pour des imprévus mais aussi pour des besoins ponctuels.
Graphe 7 : Raisons d’endettement des étudiants
Source : T-Ventures, mai 2023
- Les jeux de hasard
En matière de jeux de hasard, malgré la prévalence de la cybercriminalité auprès des jeunes, seuls 12% des étudiants admettent jouer aux jeux de hasard et 4% ont refusé de répondre à la question. La majorité exprime une préférence pour 1XBet (53%), suivi de la Loterie Nationale du Benin (18%), de Paris foot qui englobe (10%) et d’autres jeux sportifs, jeux vidéo ou loterie visa.
- Rémunération mensuelle selon les aspirations professionnelles
En se projetant dans le futur, il a été demandé aux étudiants d’estimer combien ils aspirent gagner par mois selon leurs ambitions professionnelles : 73% des étudiants souhaitent gagner entre 100 0000 et 600 000 FCFA ; 25% souhaitent gagner plus de 600 000 FCFA et seulement 2% souhaitent gagner en dessous de 100 000 FCFA. La grille détaillée se présente comme suit :
Graphe 8 : Tranche de rémunération souhaitée par les étudiants
Source : T-Ventures, mai 2023
En faisant l’analyse selon le genre, il en ressort que les femmes aspirent à gagner moins que les hommes : 75% de femmes évaluent leur rémunération future à la tranche entre 100 000 et 600 000FCFA comparé à 70% d’hommes. Par conséquent, elles se montrent moins ambitieuses que les hommes sur la tranche supérieure à 600 000FCFA (25% contre 30% chez les hommes).
Conclusion
Les trois résultats clés issus de l’analyse des comportements financiers des étudiants de Cotonou et Abomey-Calavi se présentent comme suit : (i) les étudiants qui travaillent pour subvenir à leurs besoins sont plus enclins à épargner et investir mais aussi à s’endetter afin d’améliorer leurs chances de s’en sortir ; (ii) le numérique occupe une place de plus en plus importante dans les habitudes d’achat (achat et paiement en ligne), la nature des investissements (cryptomonnaie, bourse) ou de l’endettement (forfait internet) ; et (iii) les femmes s’auto-évaluent plus sévèrement en matière de gestion financière et se montrent moins ambitieuses pour leur rémunération. Aussi, l’épargne est la pratique financière qu’elles priorisent.