(L’apurement des arriérés et l’amélioration des conditions des aspirants attendus pour 2022)
La lutte syndicale en 2021 semble porter ses fruits avec la récente annonce de la revalorisation des salaires des travailleurs prévue par le nouveau Programme d’action du gouvernement. Dans cet entretien, Noël Chadaré, Secrétaire général de la Confédération des organisations syndicales indépendantes (Cosi-Bénin) qui reconnait les nombreux acquis de 2021, notifie qu’il y a encore du pain sur la planche.
Nous sommes en train de boucler l’année 2021, une année de transition entre le confinement et la relance économique. Comment s’est passé la lutte syndicale en faveur des travailleurs en 2021 ?
La lutte syndicale s’est faite essentiellement à travers les cadres de dialogue de négociation gouvernement centrales syndicales que nous avons. Toutes les confédérations représentatives ont déposé leurs cahiers de doléances. Ces cahiers ont été d’abord compilés par le ministère et passés au peigne fin. Ensuite, nous nous sommes retrouvés dans un cadre de négociation tripartite (mis sur pied à l’issue des élections professionnelles). C’est un cadre qui s’est enrichi de l’arrivée du patronat qui s’est ajouté aux représentants des syndicats et le gouvernement. Nous avons examiné toutes les revendications que nous avons envoyées le 1er mai 2021. Le travail a été fait ministère par ministère. Ce que nous pouvons retenir, c’est qu’il y a eu des points qui ont trouvé des satisfactions, il y a des points qui sont en train d’être examinés par le gouvernement. Donc on peut dire que certains problèmes spécifiques à certains ministères ont trouvé de solutions. Les gros points concernent l’augmentation de l’indice salariale, l’augmentation du Smig, la revalorisation des salaires. Les travailleurs attendent de voir leur condition de vie s’améliorer pour avoir un pouvoir d’achat meilleur face à l’inflation que nous connaissons depuis un certain temps, sans oublier la pression fiscale sur les poches des travailleurs. On s’est donc dit qu’il était important de réclamer une revalorisation des salaires. Pour cela, on avait conclu de nous retrouver en décembre mais cette rencontre n’a pas pu se tenir jusque-là. Il faut aussi retenir qu’il y a la signature du décret qui régit la collaboration entre la CNSS et le fond national de retraite. Ce décret fait partie des acquis, des succès de 2021.
Le Programme d’action du gouvernement 2021-2026 s’annonce avec la revalorisation des salaires des travailleurs comme l’une des réformes majeures. N’est-ce pas une bonne nouvelle ?
Oui parce que c’était pour nous une revendication phare que nous avons ramenée tous les ans. Car, depuis que le Président Patrice Talon est là, il n’a pas augmenté un kopeck sur les salaires. Alors qu’on a vu le coût de la vie devenir excessivement cher et la pression fiscale qui ne cesse de monter. Il faut augmenter les salaires et le Smig qui depuis 2014 n’a pas connu d’augmentation. On ne peut pas vivre aujourd’hui au Bénin avec un salaire de 40.000 Fcfa, c’est totalement dérisoire. C’est une revendication phare pour nous. La preuve, dans le cahier de doléance de la Cosi-Bénin, déposé cette année, c’est le point numéro 1 : augmentation de l’indice salarial à hauteur de 30% et l’augmentation du Smig de 40.000 Fcfa à 60.000 Fcfa. Nous avons discuté de ça en commission mais nous n’avions pas trouvé une issue heureuse. Donc cette annonce du pouvoir qui stipule qu’il est inscrit dans le PAG2, une revalorisation des salaires est une annonce heureuse. On a été agréablement surpris de ce qu’enfin, les lignes sont en train d’être bougées. Comme prévu, on attend de discuter avec le pouvoir sur le sujet.
Pouvez-vous nous rassurer que le dialogue public privé est en bonne voixe ?
Le dialogue entre le pouvoir et nous les centrales syndicales se porte relativement bien. Même en dehors des cadres de concertations ou nous analysons les problèmes des travailleurs, nous nous appelons. Nous sommes plus pragmatiques dans les échanges avec certains ministères. Il y a une bonne relation entre les syndicats et le pouvoir public en ce qui concerne la résolution des problèmes des travailleurs. Bien que, nous ayons le sentiment que le pouvoir, c’est lorsqu’il est sûr de faire quelque chose qu’il penche en notre faveur.
Au-delà de la réforme des salaires, sur quel autre axe croyez-vous que le gouvernement doit agir pour impacter davantage les travailleurs et le peuple béninois en général ?
Nous avons l’apurement des arriérés des salares. C’est énorme ce que le gouvernement doit aux salariés. Cette revendication devrait aussi être une préoccupation du PAG2. Il y a aussi des travailleurs qui sont à la retraite et qui n’ont pas leur rappel. Il faut régler ce problème. Il y a des rappels de janvier à décembre 2016 qui n’ont pas été payés jusque-là. Il s’agit de plusieurs milliards dus et il est temps de régler ces problèmes.
De quoi sera constituée la lutte syndicale en 2022 ?
Nous souhaitons que déjà les premiers jours de janvier, qu’on s’asseye avec le gouvernement pour savoir ce qu’on met dans la revalorisation des salaires. C’est déjà une bonne chose cette prise de conscience du gouvernement qui reconnaît qu’il y a lieu de revaloriser les salaires. Vivement que l’annonce sur la revalorisation des salaires soit concrétisée. Cela montre que le pouvoir pense au social. La revalorisation n’est pas une simple augmentation des salaires. On peut augmenter de 5% ou de 10% mais revaloriser c’est donner vraiment de la valeur donc cela signifie qu’il ne sera pas question d’ajouter des miettes. Nous nous attendons aussi à ce que cette mesure s’étende de façon effective aux agents du secteur privé et aussi aux aspirants qui donnent tout ce qu’ils ont au travail mais n’arrivent pas à subvenir à leurs besoins.
Particulièrement pour les aspirants, nous demandons qu’en 2022, l’Etat puisse revoir leur traitement salarial. Egalement, il faut leur faire un contrat à longue durée. Il faut vraiment qu’on sorte de cette précarité. Les aspirants aussi sont des travailleurs et ils sont les plus nombreux dans le secteur de l’enseignement. Il est aussi important de faire la hiérarchisation des salaires. On a l’habitude d’augmenter le Smig sans faire la hiérarchisation des salaires. Normalement lorsqu’on augmente le Smig, les autres travailleurs aussi doivent ressentir ce changement sur leur traitement salarial.
Propos recueillis par Félicienne HOUESSOU